« Le génie de Trump: rejeter la culture politique dominante ». Entretien avec Michel Gurfinkiel

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Il y a un an, presque contre toute attente, Donald Trump s’installait à la Maison Blanche. Jamais un Président américain n’aura suscité autant de mépris, de moqueries voire de haine dans les pays européens. Vu d’Israël, la vision de ce Président atypique est toute autre: nous avons un ami à la Maison Blanche, s’inscrivant en rupture totale avec son prédécesseur.
Nous faisons le bilan de cette première année de « trumpisme » avec Michel Gurfinkiel, journaliste et écrivain. Fin analyste de la politique internationale et surtout proche-orientale, il a acquis aussi une expertise de la politique américaine.

Le P’tit Hebdo: Faites-vous partie de ceux qui ont été surpris de l’élection de Donald Trump?
Michel Gurfinkiel: J’étais favorable à son élection mais jusqu’à la dernière minute, je n’étais pas certain qu’il gagnerait. Il y avait certes des signes mais sa victoire a été impressionnante et désarçonnante. En réalité, la candidature de Trump a suscité un certain étonnement, voire amusement même si ce n’était pas la première fois qu’un candidat original se présentait à la Maison Blanche. Il faut bien comprendre que Trump est un personnage très particulier aux Etats-Unis. Je me suis intéressé à ses déclarations politiques pendant les 40 dernières années. Je me suis aperçu qu’il a un discours d’une cohérence et d’une constance étonnantes. Je suis alors arrivé à la conclusion qu’il voyait le monde d’une manière simplifiée et non simpliste. Cela signifie qu’il a une grande capacité à repérer les quelques facteurs essentiels (hard facts) et de s’y tenir. Il a le sens des thèmes qui parlent aux Américains et a été capable de toucher les milieux populaires et la classe ouvrière qui se sont fortement portés sur lui dans certains Etats-clés.
Par ailleurs, il est un vrai spécialiste des médias: il sait manier, comme personne, ses provocations. Cet instinct a été une des clés de sa réussite pendant la campagne électorale.

Lph: Il y a un an, a-t-on assisté à la victoire de Donald Trump ou à la défaite d’Hilary Clinton?
M.G.: D’autres candidats républicains étaient remarquables, mais apparemment, il fallait quelqu’un d’hors-norme pour gagner. Beaucoup de Républicains se sont ralliés à lui parce qu’il disait des choses intéressantes sur des dossiers cruciaux, dont le dossier israélien avec des prises de position très claires, une hostilité à l’Islam radical et la désignation de l’Iran comme danger majeur. Avec Trump, le parti républicain avait un candidat très pro-israélien et surtout extraordinairement explicite.
En face, Hilary Clinton manquait de crédibilité, surtout sur ces sujets lorsque l’on sait que le parti démocrate possède une aile gauche radicale, représentée par Bernie Sanders, virulemment anti-israélienne.

Lph: Comment expliquez-vous le degré d’hostilité des chancelleries et des medias envers Donald Trump en Europe notamment?
M.G.: Le monde diplomatique vit dans sa propre logique. Un jour un diplomate israélien m’a dit que les diplomates n’appartenaient pas aux pays qu’ils étaient censés représenter mais qu’ils vivaient sur « Diplomacia »! Quel que soit le domaine considéré tout fonctionne par paradigmes, il est convenu de croire en un certain nombre de dogmes. Sans être de la censure, certaines choses se disent d’autres non. Et si vous ne dites pas ce que l’on attend de vous, on vous considère comme un idiot. Et quand on sait à quel point les paradigmes peuvent changer du jour au lendemain, on comprend la fragilité de ce système.
Dans les milieux médiatiques, surtout en France, la diversité d’opinion n’existe pas, de peur d’être marginalisé.
Quand vous ajoutez à cela un anti-israélisme, un anti-américanisme, le fait qu’il soit de bon ton d’être pour la gauche américaine, pour ceux qui ne sont pas blancs, pour les minorités sexuelles et le tout sans réfléchir, alors vous comprenez l’hostilité envers Trump. Il est un point de convergence extraordinaire de tous ces réflexes. Le génie de Trump est de complètement rejeter et ignorer la pression de la culture dominante dans le monde politique et diplomatique.

Lph: Ces attaques sont-elles gratuites et toujours infondées?
M.G.: Ceux qui attaquent violemment Trump se retrouvent tout de même confrontés à un problème: sa politique a l’air de marcher! Je lis quotidiennement la presse américaine et je suis frappé par le nombre de personnes du centre de l’échiquier politique qui reconnaissent les succès de la politique de Trump.
Prenons le domaine économique: au bout d’un an, l’économie repart avec Trump, la réforme fiscale drastique qu’il vient de faire voter pourrait porter ce boom économique encore plus loin.
En politique étrangère, tout a l’air de fonctionner beaucoup mieux que ce que l’on croit. La décision sur Jérusalem, par exemple, est un des facteurs de lancement de la fronde salutaire en Iran. En effet, il y a 9 ans, une première révolte était née à Téhéran. Barak Obama, ne voulant pas compromettre son fameux Discours du Caire, avait choisi d’ignorer les manifestants et de laisser l’Iran organiser la répression. Cette attitude est restée profondément ancrée dans la mémoire collective des Iraniens. Aujourd’hui nous avons un Président Trump ferme face à l’Iran et sa déclaration sur Jérusalem a prouvé au peuple iranien qu’il savait tenir ses engagements. Ainsi il fournit à la révolte iranienne son slogan numéro 1: »Mourir pour l’Iran oui, mais pas pour Jérusalem ou pour la Syrie ».
Cette déclaration sur Jérusalem a aussi fait bouger les lignes avec la Russie sur le terrain. Voyant venir Trump, Poutine a fait, en juin dernier, une déclaration par laquelle la Russie se dit prête à reconnaitre Jérusalem Ouest comme capitale d’Israël.
On constate que ses prises de position, ses engagements tenus, fissurent de toute part la banquise.

Lph: Qu’est-ce qui caractérise la politique de Donald Trump au Proche-Orient?
M.G.: C’est ce que l’on appelle en anglais le »plain sense », que l’on traduit par le »bon sens » mais qui décrit une notion encore plus profonde. Trump appelle un chat un chat, ce qui est une vertu fondamentale dans la mentalité américaine du parler vrai. Ce n’est d’ailleurs pas uniquement valable sur le Proche-Orient. Il est capable d’adopter ce langage sur tous les sujets: immigration illégale, pauvreté, etc.
Au Proche-Orient, il désigne clairement qui sont les ennemis et sort de cette schizophrénie totale qui caractérise le monde lorsqu’il s’agit d’Israël en général et de Jérusalem en particulier. Il a une politique du parler vrai, de la réalité sur le terrain et basée sur une empathie envers Israël.

Lph: Cette politique très favorable à Israël nous obligera-t-elle un jour à accepter des contreparties, peut-être douloureuses?
M.G.: La politique de Trump est globalement la plus favorable à Israël que l’on puisse imaginer. Preuve en sont les déclarations claires et éloquentes du Président mais aussi de son ambassadeur David Friedman et de sa représentante à l’ONU, Nikki Haley.
La coopération militaire et stratégique a toujours été au beau fixe entre Israël et les Etats-Unis, même du temps d’Obama. Celle-ci poursuit donc son développement.
Sur le plan politique et diplomatique, la position de Trump est de dire: je suis du côté d’Israël et s’il doit y avoir un compromis, accepté par les deux parties, je l’encouragerais. Sa déclaration sur Jérusalem suit cette doctrine, puisqu’il a laissé la porte ouverte à toutes les possibilités. Il imagine une solution basée sur la réalité du terrain et il est rejoint dans ce sens par l’Arabie Saoudite et une bonne partie des Arabes israéliens de Jérusalem. Cela va encore plus loin puisque récemment Ismayil Haniyeh, dirigeant du Hamas, reprend le plan de Trump dans une déclaration étonnante, où il le présente comme un fait et non de manière polémique.

Lph: On nous prédit une défaite des Républicains aux élections de mi-mandat. Donald Trump pourrait-il terminer son mandat sans majorité?
M.G.: La première année a été difficile pour Trump notamment en raison des difficultés pour constituer autour de lui une équipe cohérente et avoir des collaborateurs dans la haute fonction publique qui acceptent d’obéir à ses directives. Ceci étant les premiers signes tangibles de la réussite de Trump commencent à exister. S’ils continuent à s’accumuler, en particulier sur le plan économique, je ne vois pas comment il pourrait perdre. Par ailleurs, les Démocrates traversent une crise importante.

Lph: Comment pensez-vous que le visage du Proche-Orient sera modifié par la politique de Trump dans les prochaines années?
M.G.: Au Proche-Orient, les pays occidentaux n’existent pas. Les Russes savent qu’ils ne peuvent pas jouer avec Trump comme ils l’ont fait avec Obama. S’il parvient en plus à se faire respecter des Arabes et des Iraniens, alors son œuvre pourra être importante.
Récemment, les archives du Quai d’Orsay ont été déclassifiées. On peut lire le rapport envoyé par Jacques Andréani, ambassadeur de France aux Etats-Unis au moment de la signature des accords d’Oslo. Il dit qu’en termes d’image, Arafat a gagné. Les accords d’Oslo ont une moindre valeur que l’image de la poignée de mains qui symbolisait, en fait, la capitulation face à Arafat et le bien-fondé de ce qu’il représentait. Cela corrobore ce que j’écrivais dans »Israël, géopolitique d’un paix ». Ces accords étaient une catastrophe absolue.
Aujourd’hui nous avons des gestes qui vont à l’opposé avec Donald Trump. Lorsqu’il s’est rendu à Riyad, il a dit devant 49 pays musulmans que l’ennemi était l’Iran et qu’il fallait condamner toutes les attaques contre Israël. Quand il s’est rendu en Israël, il a été au Kotel, ce qui est très symbolique. J’espère que ces gestes d’une très grande importance symbolique seront suivis.
Nous commençons, en tout cas, à voir beaucoup mieux qui est Donald Trump et les probabilités qu’il gagne son pari vont en augmentant.

Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay
Source :
http://www.lphinfo.com/genie-de-trump-rejeter-culture-politique-dominante-entretien-michel-gurfinkiel/

happywheels

6 Commentaires

  1. Péri-gourdin dit :

    J’adore ce président et son politiquement-incorrect !
    J’espère qu’il pourra continuer sur sa lancée avec le total soutien des deux chambres restées majoritairement républicaines !
    Vive l’Amérique sous mandat(s) Trump !

  2. VRCNGTRX dit :

    « rejeter la culture politique dominante »
    dominante chez une minorité d’enculés (les bobos, les islamocollabos et les raclures ultra-libérales pro-immigrationnistes), certainement pas dominante dans la majorité des peuples !

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