
Goldnadel : «Radio France, Cannes… Israël a bel et bien perdu la bataille médiatique»
Par Gilles william Goldnadel
Le vocabulaire utilisé pour parler d’Israël sur les chaînes publiques et la déferlante de critiques contre l’État hébreu au Festival de Cannes sont révélateurs de l’hostilité médiatique envers ce pays, estime notre chroniqueur.
«Génocide» : les Insoumis qui évoquent l’attentat antisémite d’un couple de pacifistes israéliens au musée juif de Washington en invoquant le génocide. «Génocide» : terme visant l’État refuge des survivants de la Shoah, banalisée ad nauseam. Jusqu’à la dame des Parapluies de Cherbourg signant une pétition d’artistes sous le soleil de Cannes. Gaza, c’est Auschwitz, comme une chaîne publique française le laisse dire. Chaque jour, les radios publiques livrent des bilans victimaires invérifiables, sans dire qu’ils émanent du Hamas. Israël a perdu la guerre médiatique à plate couture. Je viens écrire ici que j’avais prédit qu’il ne pouvait pas en être autrement. Dans mon Journal de Guerre (Fayard) , j’écrivais dès le 10 octobre : «J’entends ici prendre date. Le grand pogrom commis par les islamonazis a trois jours et la vraie riposte d’Israël n’a pas encore commencé. Je ne donne pas encore trois jours pour qu’Israël soit nazifié et les Arabes de Palestine peints en martyrs génocidés. Et le chef de l’armée israélienne ne sera pas Montgomery mais Rommel. Tsahal sera la Reichswehr.» Car je connaissais tristement mes classiques de l’impensé moderne.
Dans l’inconscient occidental post-soixante-huitard qui voyait un SS derrière le CRS, un militaire juif qui tue trahit le juif en pyjama rayé impuissant. Et je savais aussi que placé dans une alternative existentielle diabolique entre ne rien faire et faire une guerre atroce dans un espace restreint, l’État pogromisé opterait pour la guerre atroce de survie. Qu’il ne ferait pas plus dans la dentelle que les troupes alliées contre l’Allemagne nazie. Je savais bien qu’à Dresde en 1945, les avions américains avaient causé 30.000 morts et 78.000 blessés parmi les civils allemands. Je savais aussi ce qui était resté de ma bonne ville de Rouen après que les avions libérateurs l’ont bombardée de haut. Et les soldats germains n’étaient pas eux terrés sous les écoles, les mosquées ou les hôpitaux à jouer à qui perd son enfant gagne. Je connaissais évidemment, au-delà du poids de l’idéologie, le poids du nombre et de la soumission grégaire au pouvoir de la foule dans les manifestations de masse.
Mais j’ai beau l’avoir prédit, je n’en suis pas moins meurtri. Meurtri pour les miens. Meurtri pour les otages oubliés. Meurtri pour les enfants israéliens comme palestiniens, meurtri pour les petits Bibas, victimes de ce Hamas dont on ne parle plus. Meurtri du spectacle donné par la pensée réflexe de la presse idéologique. Meurtri tout simplement par le sentiment inné de l’injustice. J’ai un peu honte à devoir préciser que la nazification de l’État Juif n’a rien à voir avec la critique légitime et nécessaire d’un gouvernement israélien parfaitement critiquable. L’obsession pathologique de focalisation de Sion n’est pas nocive uniquement pour l’État juif. Tandis que la loupe est braquée sur Gaza, des centaines de milliers d’hommes et de femmes, du Soudan au Congo en passant par la Somalie, sont massacrés et violés dans l’indifférence et le silence suprêmes. La presse bien pensante ose même les nommer les «conflits oubliés» alors qu’elle refuse d’évoquer ces conflits infiniment plus meurtriers. Il est vrai que pour elle, une vie noire ne vaut rien si elle n’est pas ôtée par un grand méchant blanc.
Gros plan final sur Cannes pour confirmation. Le courageux cinéaste iranien Jafar Panahi a reçu la récompense suprême. Mais c’est la République des mollahs qui devrait recevoir la palme d’or de l’impunité. Voilà une dictature islamiste qui détient des otages français. Qui torture ses opposants. Qui voile de force ses femmes. Qui pend ses homosexuels. Qui finance le terrorisme. Mais aucune pétition à Cannes ou à l’ONU ne la condamne, elle. Ce n’est pas elle l’État paria. À croire que jurer la disparition du seul état démocratique, fût-il bien imparfait et parfaitement critiquable, du Proche-Orient ne confère magiquement un secret pouvoir protecteur. Consolation pour Israël : il y avait encore pire que de perdre la guerre des images ingagnable. Perdre la guerre réelle.
Source Le Figaro
Quand Israël délègue sa communication à des militaires ou des membres du gouvernement, l’effet est catastrophique sur la forme. Il faut bien comprendre une fois pour toutes que la bataille ne se joue pas sur les réalités, mais sur les perceptions. À ce titre, la stratégie de communication uniquement defensive d’Israël est vouée à l’échec…