La double vie de Tariq Ramadan

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De Caroline Fourest
Il m’a fallu des années pour démontrer le double discours de Tariq Ramadan.
Depuis 2009, je savais qu’il menait aussi une double vie, à l’opposé de ses nombreux sermons sur la « conception islamique de la sexualité ». Pourtant, je n’ai pas pu l’écrire. Les faits les plus graves ne pouvaient être révélés sans preuves solides, sans qu’une victime porte plainte. D’autres, bien que révélateurs d’une pathologie aussi hypocrite que misogyne, relevaient de sa vie privée. J’avais suffisamment d’éléments à charge démontrant la duplicité de Tariq Ramadan pour ne pas aller sur ce terrain-là. Mais j’ai alerté des confrères et même des lieutenants de Ramadan. Rien ne se passait.
Les groupies du prédicateur continuaient de le citer pour rappeler que les relations sexuelles hors mariage étaient haram. Je souriais en écoutant ses sermons puritains sur la tentation et le devoir de chasteté. Comme cette cassette sur « les grands péchés », où il s’emporte contre les hommes osant se baigner dans des piscines mixtes : « Tu vas là-bas et forcément ça t’attire ! » Dans ce prêche, il presse ses ouailles à « militer » pour des « lieux où c’est sain », entendez des piscines non mixtes. Le ton de ces cassettes n’est pas celui du Tariq Ramadan policé des plateaux de télévision, mais celui d’un prédicateur obsédé par la sexualité. Ce qui trahit toujours une névrose plus personnelle.

Quand je fais le bilan de tous les prédicateurs intégristes, chrétiens ou islamistes sur lesquels il m’est arrivé d’enquêter, je ne crois pas être tombée une seule fois sur un homme menant une vie sexuelle équilibrée, ou simplement conforme à ce qu’il prêchait. Le monde regorge de télévangélistes homophobes ayant des relations homosexuelles, de prêtres pédophiles et de prédateurs sexuels islamistes.
Dans le cas de Tariq Ramadan, il semble que nous soyons face à un comportement digne de Harvey Weinstein, en peut-être plus violent. Si j’écris cette phrase aujourd’hui, alors qu’elle pourrait me coûter un premier procès du principal intéressé, c’est parce qu’une femme, Henda Ayari, a eu le courage de porter plainte pour viol, agression sexuelle, harcèlement et intimidation. Bien sûr, Tariq Ramadan nie et va l’attaquer. Sur les réseaux sociaux, l’un de ses fidèles lieutenants y voit déjà un complot « sioniste international ». Ses fans accusent la victime, une salafiste repentie, de mentir et de vouloir se faire de la publicité (enviable comme chacun sait). Je ne l’ai pas rencontrée. Mais ce dont je peux témoigner, c’est que son récit, précis et terrifiant, ressemble énormément à celui de quatre autres femmes que j’ai rencontrées.

C’était en 2009, à la veille de mon fameux débat avec Tariq Ramadan chez Frédéric Taddeï. La presse l’avait annoncé. Une première femme m’a contactée pour me dire ce qu’elle avait vécu. Je me méfiais. Un faux témoignage pour me pousser à la faute ? Avec Tariq Ramadan, il faut toujours s’attendre à tout. Au début, je n’ai pas répondu. Ses écrits devenaient précis. Pour en avoir le cœur net, j’ai fini par la voir. Elle m’a montré des SMS puis des photos édifiantes. Elle m’a également mise en relation avec d’autres filles. Toutes avaient vécu à peu près la même histoire. Une demande de conseil religieux transformé en relation sexuelle compulsive, parfois consentie, souvent violente et très humiliante, avant de finir en menaces. L’une d’elles avait subi un traitement pouvant faire l’objet d’une plainte. Je l’ai présentée à un juge. Mais Tariq Ramadan lui faisait trop peur. Elle se sentait suivie. Elle était clairement trop fragile pour persévérer. Ma conscience refusait de la pousser sur un chemin dont je craignais qu’elle ne sorte déchiquetée. Je suis bien placée pour connaître la violence des réseaux des Frères musulmans quand on tient tête à « frère Tariq ». J’entends des donneurs de leçons se gausser sur le mode « tout le monde savait et n’a rien dit ». Ils sont loin d’imaginer la tornade qui se serait abattue sur cette jeune femme si elle avait osé briser l’omerta à l’époque. Maintenant que Henda Ayari a eu ce courage, c’est différent. Mon devoir est d’inviter toutes celles qui le peuvent à témoigner. Dans la presse ou à son procès. Pour ne pas l’abandonner, seule, face à la meute.
Source :
https://www.marianne.net/debattons/editos/la-double-vie-de-tariq-ramadan

happywheels

13 Commentaires

  1. daniel. Danielle dit :

    Bravo Mme fourrest pour mener ce courageux combat !!!

  2. Coco dit :

    Une femme sensée Caroline qu’il faut soutenir

    • Daniel dit :

      Faux!!! la Fourrest est une sombre con…sse.
      Mais ce combat là, est juste !!
      Et sur celui ci elle mérite notre soutien.
      Alors ne confondez pas tous, et ne lui donnez pas de blanc saint.
      Sur d’autres terrains, elle craint!!!

  3. Haddad dit :

    Bravo pour votre courage.halte au double langage de ces faux dévots ,de ces tartuffes,donneures de leçons

  4. Elisseievna dit :

    Le double langage et l’acharnement contre Anne marie delcambre …http://elisseievna.blogspot.fr/2017/06/caroline-fourest-se-f-de-la-gueule-du.html

  5. Bernadette dit :

    Concernant les prêtres, un autre avis: her frère journaliste,

    Je suis un simple prêtre catholique. Je me sens heureux et fier de ma vocation et cela fait vingt ans que je vis en Angola comme missionnaire.

    Je constate dans de nombreux médias, surtout dans votre journal, une recrudescence des articles consacrés aux prêtres pédophiles, toujours sous un angle morbide, scrutant dans leurs vies les erreurs du passé.

    Il y en eut dans telle ville des États-Unis dans les années 70, dans telle paroisse australienne dans les années 80, et ainsi de suite jusqu’aux exemples les plus récents… Tous condamnables c’est une certitude !

    Certaines présentations journalistiques sont pondérées et équilibrées. D’autres exagèrent, causent un préjudice, sèment la haine. Je ressens moi-même une grande douleur pour le mal immense que provoquent ces personnages qui devraient être des signes vivants de l’Amour de Dieu. Ils infligent un coup de poignard à la vie de trop d’êtres innocents. Il n’y a pas de mots pour justifier de tels actes. Il n’y a pas de doute non plus sur le soutien que l’Église prodigue aux faibles et aux plus démunis. Pour cette raison, sa priorité absolue demeurera toujours d’adopter et de promouvoir toutes les mesures nécessaires pour la prévention et la protection de la dignité des enfants.

    Je m’étonne de lire si peu de nouvelles au sujet de ces milliers de prêtres qui sacrifient leur vie et s’épuisent pour des millions d’enfants et d’adolescents, riches ou pauvres, choyés ou défavorisés, aux quatre coins du monde.

    Je pense que le New York Times ne sera donc pas intéressé d’apprendre :

    Que j’ai dû transporter des dizaines d’enfants faméliques par des chemins minés à cause de la guerre de 2002, entre Cangumbe et Lwena (Angola), car le gouvernement ne pouvait le faire et les ONG n’y étaient pas autorisées ;

    Que j’ai dû enterrer des dizaines d’enfants morts pendant leur exode pour fuir la guerre ;

    Que nous ayons sauvé la vie de milliers de personnes dans le Moxico grâce au seul centre de santé existant dans une zone de 90 000 km2, en distribuant de la nourriture et des semences ;

    Que nous ayons pu fournir éducation et écoles à plus de 110 000 enfants au cours de ces dix dernières années ;

    Il demeure sans intérêt qu’avec d’autres prêtres, nous ayons eu à secourir près de 15 000 personnes dans les campements de la guérilla, après qu’ils aient rendu les armes, parce que les aliments du gouvernement et de l’ONU n’arrivaient pas ;

    Ce n’est certainement pas une nouvelle intéressante qu’un prêtre de 75 ans, le père Roberto, parcoure encore la ville de Luanda, soignant les enfants des rues, les conduisant à un foyer d’accueil, pour qu’ils soient désintoxiqués de l’essence qu’ils avalent pour gagner leur vie comme cracheurs de feu ;

    L’alphabétisation de centaines de prisonniers n’est probablement pas non plus une information cruciale ;

    Comme il est inutile de savoir que d’autres prêtres, comme le Père Stéphane, organisent des auberges de jeunesse pour servir de refuge aux jeunes maltraités, battus, et même violés ;

    Il n’est pas davantage intéressant que le père Maiato, de haut de ses 80 ans, visite les maisons des pauvres, une à une, réconfortant les malades et les désespérés ;

    Ce n’est pas une information non plus que près de 60 000 prêtres – sur les 400 000 prêtres et religieux du monde – aient quitté leurs pays et leurs familles pour servir leurs frères dans une léproserie, des hôpitaux, des camps de réfugiés, des orphelinats. De soigner les enfants accusés de sorcellerie ou orphelins de parents morts du sida. De gérer des écoles pour les plus pauvres, des centres de formation professionnelle, des centres d’accueil pour les séropositifs, etc.

    Sans parler de ceux qui dépensent leur vie dans des paroisses et des missions, à motiver les gens pour mieux vivre et surtout pour aimer ;

    Ce n’est pas une information que mon ami, le père Marc-Aurèle, pour sauver des enfants pendant la guerre en Angola, les ait transportés de Kalulo à Dondo et qu’il ait été mitraillé sur le chemin du retour de sa mission. Ou que le Frère François avec cinq dames catéchistes, soient morts dans un accident en allant aider des régions rurales les plus reculées du pays ;

    Que des dizaines de missionnaires en Angola soient morts d’une simple malaria, faute de moyens sanitaires ;

    Que d’autres aient sauté sur une mine, en visitant leurs fidèles (dans le cimetière de Kalulo se trouvent les tombes des premiers prêtres qui sont arrivés dans la région : aucun n’a dépassé les 40 ans) ;

    Ce n’est pas vendeur de suivre un prêtre « normal » dans son travail quotidien, dans ses difficultés et ses joies, dépensant sa vie sans bruit en faveur de la communauté qu’il sert.

    La vérité, c’est que nous ne cherchons pas à créer l’information, mais simplement à porter la Bonne Nouvelle, cette Nouvelle qui, sans bruit, a commencé à faire parler d’elle au cours de la nuit de Pâques. Un arbre qui tombe fait plus de bruit que mille arbres qui poussent.

    On fait beaucoup plus de bruit pour un prêtre qui commet une faute, que pour des milliers qui donnent leur vie pour les pauvres et les indigents.

    Je ne prétends pas ici faire l’apologie de l’Église et de ses prêtres.

    Un prêtre n’est ni un héros ni un névrosé. Il est simplement un homme normal qui, avec sa nature humaine, cherche à suivre Jésus et à Le servir dans ses frères.

    Chez les prêtres, il y a de la misère, de la pauvreté et des fragilités comme chez tous les êtres humains ; mais il y a également de la beauté et de la grandeur comme en chaque créature. Insister d’une manière obsessionnelle et persécutrice sur un thème douloureux, en perdant de vue l’ensemble de l’œuvre, esquisse volontairement des caricatures offensantes pour le sacerdoce catholique, et par lesquelles je me sens offensé.

    Je te demande seulement, ami journaliste, de rechercher la Vérité, le Bien et la Beauté. Ainsi tu grandiras avec noblesse dans ta profession.

    Dans le Christ,

    Père Martin Lasarte, SDB

  6. CHEVALLOT Gerard - Henry dit :

    Cette figure de gauche n’est pas plus crédible que le pervers islamiste qui l’éblouie et la subjugue .
    Ayant encore bien présent en mémoire le fameux débat chez Taddei , je garde le souvenir d’une harpie agressive sans aucun argument fondé et buvant les réponses alambiquées de son contradicteur . Ce beau parleur porte sur son visage toute la haine de notre démocratie, mais profite plus que de raison de ces avantages.
    Depuis cette période, j’essaye de suivre le parcours de la polémiste et je constate que ces propos sont souvent creux , arbitraires, sans fondements solides et laissent le goût amer de la frustrée mal dans sa peau !!!

    • José Pahat dit :

      Vois avez une façon remarquable d’argumenter sur le fond…il faut que je prenne des cours avec vous. C’est sensationnel! Se lâcher à partir d’une appréhension personnelle sur la forme pour éviter le fond, bravo! L’attaque ad hominem ! Encore bravo ! Quelle élévation de pensée!
      C’est d’une originalité sans faille(s). Vous êtes très innovateur.
      Ne vous êtes- vous pas trompé de site? En général, les bas de plafond et autres champions de l’esquive, incapables de se prononcer sur le fond, sévissent chezxnos adversaires. Bon vent.

  7. José Pahat dit :

    Même si je ne suis pas toujours d’accord avec Caroline Fourrest, je lui suis reconnaissant du travail qu’elle a mené et continue de mener pour traquer » l’infâme «  «  frère tarik ». J’ose espérer sa déchéance proche. Mais ce n’est pas seulement une affaire de femmes ! Que la ldj propose un soutien actif à Henda Ayari qui va, qui en a besoin. Maintenant tout de suite.
    Les imbéciles complotistes , antisémites, antisionistes et leurs salopards d’idiots utiles et islamo- gauchistes sont déjà à l’oeuvre. Que faudrait- il craindre de plus? Il faut que les camps se déterminent au plus vite. Il en va de notre survie.

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