L’invraisemblable pétition de soutien à Houria Bouteldja

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Pour la sociologue Nathalie Heinich, les signataires qui défendent la militante indigéniste trahissent leurs propres valeurs et nuisent à leur réputation.

Le 17 janvier 2021, une pétition intitulée « Contre la calomnie et la diffamation, en soutien à Houria Bouteldja » a été postée sur le site acta.zone. Le texte s’insurge contre les accusations d’antisémitisme portées contre Houria Bouteldja en raison d’un blog publié dans Mediapart (puis rapidement retiré du site) où, après des commentaires antisémites contre la dauphine de Miss France 2020, dont le père est italo-israélien, l’auteur affirmait : « On ne peut pas être israélien innocemment. »
« Non, Houria Bouteldja n’est pas antisémite », plaident les signataires en soutien à une « authentique militante décoloniale ». Le seul problème à leurs yeux, c’est cette « campagne diffamatoire profitant à un certain courant d’idées [qui essaime du Printemps républicain à Valeurs actuelles en passant par l’extrême droite] », et qui ne peut provenir que « des personnes et groupes qu’en général on retrouve en première ligne chaque fois qu’il est question de défendre l’État face aux avancées de l’antiracisme politique ». « Avancées » : voilà un curieux terme pour qualifier la régression que ce courant décolonial, obsédé par la « racialisation », fait subir à la cause de l’antiracisme.
Antiféministe, homophobe, pro-islamiste et raciste
Rappelons que la présumée victime de l’attaque en question est l’ex-porte-parole du Parti des Indigènes de la République (le bien nommé « PIR »), lequel se définit comme « antiraciste et décolonial », mais est régulièrement accusé d’être aussi antiféministe, homophobe, pro-islamiste et raciste. Rappelons aussi que Houria Bouteldja a critiqué les manifestations de soutien à Charlie Hebdo après l’incendie de ses locaux en 2011 ; qu’elle a affirmé en 2012, lors d’une émission télévisée, que « le mode de vie homosexuel n’existe pas dans les quartiers populaires » ; et qu’elle a été l’auteur en 2016 d’un livre intitulé Les Blancs, les Juifs et nous (on attend impatiemment son homologue Les Noirs, les Arabes et nous, au cas où un éditeur voudrait se risquer à publier un tel titre – Éric Hazan peut-être, signataire de cette pétition ?).
Innocents massacrés
Et donc : « On ne peut pas être israélien innocemment. » Autant dire que tout citoyen est comptable de tout ce qu’a pu faire, de tout temps, la nation à laquelle il appartient – car une nation existe au passé aussi bien qu’au présent. Alors autant dire aussi, n’est-ce pas, qu’« on ne peut pas être français innocemment », puisqu’au nom de la France ont été commis tant de croisades, de crimes de guerre, de conquêtes coloniales et même d’erreurs judiciaires ? Autant dire « On ne peut pas être algérien innocemment », puisque des innocents ont été massacrés par des Algériens, et en particulier par les islamistes au cours des années noires (alors, Houria Bouteldja, vous seriez donc coupable des crimes de vos concitoyens islamistes ?). Et bien sûr « On ne peut pas être américain innocemment » – pensez à l’esclavage, à la guerre du Vietnam, aux délires trumpistes ? Sans compter non plus qu’« on ne peut pas être russe innocemment », ni chinois, ni turc, ni même palestinien, alors, étant donné les attentats qui ont tué tant d’innocents ?
Faire d’un individu le représentant du collectif au sein duquel il est né, et lui faire porter la responsabilité des actions de ce collectif, de tout temps et en tout lieu : voilà ce à quoi, de tout temps et en tout lieu, a prétendu régulièrement l’alliance de la bêtise et de la méchanceté ; voilà ce que les pires racistes, les pires antisémites, les pires extrémistes ont voulu imposer en stigmatisant, en lynchant, en assassinant des innocents, présumés coupables du seul fait qu’ils appartiennent à un collectif honni ; et voilà l’une des plus répugnantes manifestations de l’injustice – cette injustice contre laquelle, lorsqu’on est de gauche, on est censé lutter.
Prose délirante
Et donc : au nom de positions prétendument progressistes, non seulement les pétitionnaires laissent affirmer sans ciller qu’« on ne peut pas être israélien innocemment », mais ils poussent des cris d’orfraie face à ceux qu’une telle déclaration horrifie, à juste titre, et qui ont le courage et la dignité de le dire.
En conclusion de la pétition, les auteurs insistent : « Antisémite, Houria Bouteldja ? En aucun cas. Et l’en accuser relève non seulement de la calomnie mais aussi de la diffamation. » Vraiment ? Si c’est cela calomnier, si c’est cela diffamer, alors je serais fière de calomnier et fière de diffamer, c’est-à-dire d’appeler un chat un chat, et un pervers un pervers.
Mais de quoi relève un tel aveuglement, sinon de la bêtise ? Les signataires ont-ils vraiment lu la prose délirante de Houria Bouteldja ? Et comment peuvent-ils imaginer que quiconque sera dupe de leur tour de passe-passe présentant comme de droite des critiques de leurs positions prétendument de gauche, mais qui relèvent des concepts et des procédés totalitaires propres à l’extrême droite et au stalinisme ?
Pourquoi patauger dans le marais ?
Parmi les signataires de cette invraisemblable pétition, on relève de soi-disant chercheurs qui détournent leur situation universitaire pour soutenir des positions militantes à coups de concepts pseudo-savants qui ne trompent que les nigauds ; quelques compagnons de route des Frères musulmans ; mais aussi – et comment ne pas s’en affliger – des intellectuels que j’estime et même admire. Que viennent donc faire dans cette galère la formidable écrivaine qu’est Annie Ernaux, le grand éditeur qu’est François Gèze, la remarquable philosophe qu’est Isabelle Stengers ? Vous avec qui j’ai eu l’honneur de travailler, pourquoi gâchez-vous votre réputation en pataugeant dans ce marais ? Et comment vous prétendre encore « de gauche » en signant un texte qui défend la propagandiste des idéologies mêmes que vous vous faites – comme moi-même – une fierté de combattre ? Ne voyez-vous pas à quel point vous trahissez les valeurs qui sont les nôtres ?
Et ne craignez-vous pas qu’on ne finisse par dire, à votre propos : « On ne peut pas être aveugles innocemment » ?
* Nathalie Heinich est sociologue. Dernier ouvrage publié : La maison qui soigne. Histoire de la « Retrouvée »( éditions Thierry Marchaisse).
**Cet article est issu des travaux de l’Obervatoire du Décolonialisme et des idéologies identitaires, un collectif d’universitaires qui se sont donné pour mission d’analyser les thèses dites « décoloniales » et intersectionnelles. Ces discours, qui s’ancrent dans des courants militants, favorisent les lectures essentialisantes et racialistes des rapports sociaux. Ces idéologies pénètrent peu à peu le monde universitaire, entravant divers travaux et controverses académiques. Le Point entend libérer et partager cette parole ici avec ses lecteurs.
Source :
https://www.lepoint.fr/debats/l-invraisemblable-petition-de-soutien-a-houria-bouteldja-22-01-2021-2410717_2.php

happywheels

7 Commentaires

  1. limone dit :

    c’est une pub pour royal canin

  2. Franccomtois dit :

    La France boit la tasse,attention á la noyade.Tenez:
    « Journal » Laprovence:
    Marseille : opération « nettoyage » dans la cité de La Castellane
    Si la descente, sans doute éventée, n’a permis aucune interpellation et de maigres saisies, elle a engendré un fort manque à gagner pour les dealers.

    -Extraordinaire,les dealers prévenus,mais par qui?Nous pourrions presque en rigoler si le sujet n´était pas aussi dramatique.Je comprend mieux cette vague de crêve la faim qui se jettent sur la France,même ambiance donc aucun mal du pays et de plus tout les mois ils ont du fric qui leur permet de vivre largement mieux que chez eux.Pourquoi leur donner tord,stupide que de se gêner.Quand nous lisons un des articles du Canard certains flics qui sont recrutés ne sont même pas capable de s´exprimer correctement en Francais et pour l´écriture c´est du phonétique,inquiétude,France une favella(ceci sans mépris pour les brésiliens miséreux)?
    Pour la houria bouteldja🤮 elle est sous la protection du jack lang,je me demande bien pourquoi?

  3. benjamin dit :

    on est israelien avec honneur fiertè et gloire !ne vous en deplaise tas de connards algériens stupides et inutiles a la France qui vous nourrit et vous soigne tres bien gratis !!!

  4. DAVID dit :

    Malheureusement
    Beaucoup de juifs collabos islamistes ont signé ce torche cul

  5. koutchouk dit :

    DONNEZ les nons des signataires

    • liguedefensejuive dit :

      Contre la calomnie et la diffamation, en soutien à Houria Bouteldja
      17 janvier 2021

      Gil Anidjar, professeur, Columbia University (États-Unis)
      Simon Assoun, éducateur spécialisé, militant Union juive française pour la paix
      Eric Aupol, photographe, enseignant
      Ariella Aïsha Azoulay, professeure de culture moderne (États-Unis)
      Ludivine Bantigny, historienne, universitaire
      Yesse Belkhodja, militante décoloniale, porte-parole du Collectif de défense des jeunes du Mantois
      Omar Benderra, économiste
      Mounia Bennani-Chraïbi, professeur ordinaire de politique comparée, Université de Lausanne
      Amal Bentounsi, militante contre les violences policières
      Elise Bernard, intermittente du spectacle
      Judith Bernard, enseignante et metteuse en scène
      Omar Berrada, écrivain, chercheur
      Julie Billaud, professeur associée d’anthropologie, The Graduate Institute, Genève
      Daniel Blondet, CGT Educ’action, militant anti-impérialiste
      Patrick Bobulesco, libraire
      Félix Boggio Ewanjé-Epée, professeur de philosophie
      Mathieu Bonzom, universitaire
      Marion Bordessoulles, CGT Spectacle
      Alain Brossat, professeur émérite
      Sébastien Budgen, éditeur Verso Books
      François Burgat, politologue
      Ismahane Chouder, militante féministe
      Thomas Coutrot, économiste, militant altermondialiste
      Julie Crenn, historienne de l’art
      Julien Crépieux, artiste
      Alain Damasio, écrivain
      Querelle Delmas, militant queer
      Mathias Delori, chercheur CNRS en sciences politiques
      Christine Delphy, sociologue, féministe
      Laurent de Wangen, militant associatif
      Daphné Dolphens, militante antiraciste
      Tal Dor, sociologue
      Baudouin Dupret, Sciences Po Bordeaux
      Ali El Baz, militant de l’immigration
      Annie Ernaux, écrivaine
      Hervé Falcetta, maçon, CGT SLCBA
      Olivier Fillieule, professeur ordinaire de science politique à l’Université de Lausanne et directeur de recherche au CNRS
      Caroline Gay, comédienne
      François Gèze, éditeur
      Anahita Grisoni, Sociologue et urbaniste
      Georges Gumpel, Union juive française pour la paix, Partie Civile au procès de Klaus Barbie
      Eric Hazan, éditeur
      Choukri Hmed, maître de conférences, Université Paris-Dauphine
      Rachid Id Yassine, sociologue, Université Gaston Berger, Sant-Louis
      Philippe Jouary, cadre associatif
      Saad Jouni, rédacteur en chef de Decolonial News
      Stefan Kipfer, professeur, Université York, Toronto
      Safi Khatib, syndicaliste
      Farhad Khosrokhavar, sociologue
      Anna Knight, traductrice
      Richard Labévière, journaliste, rédacteur en chef de prochetmoyen-orient.ch
      Thierry Labica, Université de Nanterre
      Baptiste Lanaspeze, éditeur
      Thomas Lancelot, militant antisioniste et féministe
      Gaëlle Le Fur, sociologue
      Alana Lentin, Western Sidney University
      Raphaël Liogier, professeur des universités, Sciences Po Aix-en-Provence
      M’baïreh Lisette, militant décolonial et anticolonialiste
      Franco Lollia, Brigade antinégrophobie
      Pierre Magne, professeur agrégé de philosophie et maître de conférences à l’École Polytechnique
      Joëlle Marelli, traductrice
      Joseph Massad, Columbia University
      Gustave Massiah, économiste, altermondialiste
      Pascal Menoret, professeur titulaire, Brandeis University (Massachusetts)
      René Monzat, militant antiraciste
      Dominique Natanson, animateur du site Mémoire juive & éducation
      Melanie Ngoye Gaham, militante
      Annie Ohayon, productrice
      Tristan Petident, militant NPA
      Alexandre Piettre, philosophe et sociologue du politique et des religions, Université de Lausanne
      Charles Poitevin, écrivain
      Geneviève Rail, professeure émérite, Institut Simone-De Beauvoir
      Ben Ratskoff, éditeur en chef de PROTOCOLS
      Gianfranco Rebuccini, anthropologue, chargé de recherche au CNRS et militant queer
      Jonathan Ruff-Zahn, UJFP, rappeur
      Nordine Saidi, militant décolonial et membre de Bruxelles Panthères
      Catherine Samary, économiste altermondialiste
      Raphaël Schneider, co-fondateur de Hors-Série
      Khadija Sendhaji, militante antiraciste, décoloniale (Bruxelles)
      Michèle Sibony, militante antiraciste, Union Juive Française pour la Paix
      Maboula Soumahoro, Présidente Black History Month
      Isabelle Stengers, philosophe
      Julien Théry, historien
      Gavan Titley, University of Maynooth
      Enzo Traverso historien
      Karim Van Dromme, bénévole à l’Unafam et militant contre le validisme et la psychophobie
      Ghyslain Vedeux, militant antiraciste, président du Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN)
      Françoise Vergès, politologue, féministe décoloniale
      Marianne VL Koplewicz, éditrice
      Michel Warschawski, militant anticolonialiste israélien
      Sarah Youbi, interne en médecine générale
      Hela Yousfi, maître de conférences, Université Paris-Dauphine

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