
Simon Moos. « Lorsqu’on marche dans les rues de Jérusalem ou le long des faubourgs de Tel Aviv… »
Hier soir, attablé avec des amis dans une rue prisée de la jeunesse tel-avivienne, je fus soudain saisi par un mouvement de foule. Une marée humaine déferla, renversant verres et tables dans un fracas de panique. Je pris mes jambes à mon cou et trouvai refuge dans la cour intérieure d’un restaurant où des jeunes femmes perdaient connaissance. Dieu merci, il ne s’agissait que d’une fausse alerte. Nul ne sut dire ce qui avait déclenché cette panique. La société israélienne, à la fois traumatisée et résiliente, vit sous tension.
Pourtant, au milieu de la cohue, je fus frappé par une autre vision. Celle de civils qui, sans la moindre hésitation, dégainèrent leurs armes et coururent en sens inverse. Parmi eux, des hommes aux allures de bourgeois bohèmes, des barbus frêles, une femme en sandales de plage. Malgré les battements affolés de mon cœur, je ressentis une étrange impression de sécurité. Alors, je compris un peu mieux pourquoi tant de Juifs quittent la France pour Israël. Non parce qu’on y serait mieux protégé, il serait faux de le prétendre, mais parce qu’en Israël, le peuple a fait le choix de se défendre. Un peuple qui connaît l’ennemi, qui ne s’excuse pas d’exister, qui a élevé la solidarité au rang d’évidence.
Je suis français jusqu’à la moelle. Mon pays coule dans mes veines. Mes ancêtres sont tombés pour la France et je remercie le ciel de m’avoir fait fils de ce grand peuple. Je ne ressens aucun malaise identitaire. Je porte l’héritage de plusieurs siècles d’histoire juive en France, une histoire de bonheurs et de drames. Et c’est par amour de mon pays que je lui souhaite de retrouver ce que j’admire tant en cette autre part de moi que l’on appelle Israël.
Car lorsque l’on marche dans les rues de Jérusalem, lorsque l’on flâne le long des faubourgs de Tel Aviv et que, entre deux gestes d’affection échangés par de parfaits inconnus, on croise un soldat que des passants félicitent, on retrouve un parfum de France oubliée. On redécouvre l’âme d’une nation qui se sait telle et qui avance, vaille que vaille, vers l’avenir. Une résilience faite peuple, une solidarité devenue naturelle, un patriotisme évident.
Oui, je rêve d’une France redevenue nation.
© Simon Moos
Source Tribune Juive