Le parfum antijuif de la nouvelle passerelle de Puteaux

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Un antisémite “admirateur” du fascisme choisi pour baptiser une passerelle à Puteaux
Pour baptiser sa nouvelle passerelle, la mairie de Puteaux (Hauts-de-Seine) a choisi de rendre hommage au père de la parfumerie moderne François Coty, qui a promu le fascisme et l’antisémitisme dans les années 1930. De quoi susciter l’incompréhension chez l’opposition.
Par Pierre de Baudouin

Le nom du parfumeur n’est pas passé sous le nez de l’opposition. Puteaux, à l’Ouest de Paris dans les Hauts-de-Seine, a baptisé sa nouvelle passerelle, ouverte début septembre, en mémoire de François Coty : le père de la parfumerie moderne et grand public, et l’un des hommes les plus riches de France en son temps. Si cet industriel et ancien sénateur corse né en 1874, aujourd’hui largement méconnu, « fut le plus grand industriel français du parfum au début du XXe siècle » comme le met en avant sur son site la municipalité, l’homme fut aussi un soutien actif de l’extrême droite.

L’entrepreneur a en effet créé en 1928 L’Ami du peuple, un « journal très antisémite, à l’origine de la première grande campagne antisémite en 1931 et 1932 » dans le pays, comme l’explique Laurent Joly, directeur de recherche au CNRS spécialisé dans l’étude de l’antisémitisme. « C’était un grand admirateur de Benito Mussolini, qui rêvait comme d’autres à l’époque de voir le fascisme appliqué en France, raconte l’historien. Il a d’ailleurs créé une ligue ouvertement fasciste, la Solidarité française. »
Le Canard enchaîné, dans son numéro publié ce mercredi, rappelle par ailleurs que François Coty avait, dans les années 1920, racheté Le Figaro. Dans un édito daté de 1933 d’après l’hebdomadaire, l’industriel qualifiait de « bolchéviste » et d’« israélite » un certain Albert Einstein, qui venait de se voir proposer une chaire au Collège de France.

L’image controversée de François Coty a ainsi poussé Christophe Grébert, conseiller municipal d’opposition (sans étiquette), à s’insurger contre l’hommage rendu par la mairie à celui qu’il accuse d’être un « admirateur du nazisme et du fascisme ». « Il y a une certaine symbolique derrière un pont, c’est le contraire d’un mur, d’un obstacle, soutient l’élu. On aurait pu trouver une personnalité qui symbolise l’humanisme, la paix, le lien… Là, il y a une erreur de casting. Certes, personne n’est jamais ni tout noir, ni tout blanc, mais c’est une faute politique de nommer un équipement public en référence à quelqu’un qui s’est si lourdement trompé vis-à-vis de l’Histoire, en soutenant le fascisme et l’antisémitisme. »
Si la mairie défend sur son site que l’industriel « installa une usine sur l’île de Puteaux », Christophe Grébert a bien du mal à comprendre le choix de l’exécutif : « Il n’appartient même pas véritablement à l’Histoire de Puteaux. Ce nom aurait dû rester oublié, alors pourquoi le déterrer ? Ça me rend triste pour les habitants. »
Même étonnement du côté de Laurent Joly. L’historien, qui note que le stade de l’AC Ajaccio porte certes également le nom de l’entrepreneur (il fut élu maire de la ville corse de 1931 et 1934), le chercheur qualifie François Coty de « Mussolini raté qui n’a pas vraiment laissé de trace dans l’Histoire ». « C’est un personnage très peu intéressant, peu intelligent, avec une plume sans talent, juge-t-il. Il a essayé de percer en politique grâce à son argent en finançant des journaux d’extrême droite et des mouvements comme l’Action française, mais il est resté sans envergure dans le milieu nationaliste. »
L’historien rappelle aussi que l’industriel, devenu milliardaire grâce au parfum, a fini sa vie ruiné après le krach de 1929 : « Il est mort en 1934 d’une façon assez minable, et après son décès tout a disparu, c’est resté un épiphénomène ». Si son nom peut faire polémique, la passerelle semble par ailleurs – d’un point de vue beaucoup plus pratique – difficile à traverser pour certains habitants.
L’accès au pont, censé être ouvert aux piétons et aux cyclistes, est en effet compliqué pour les deux-roues d’après Christophe Grébert : « Il n’y a pas de rampe d’un des deux côtés, c’est mal pensé. On a débloqué 10 millions d’euros pour une passerelle à laquelle on ne peut pas accéder sans emprunter un ascenseur ou enjamber des escaliers. » Le pont a pourtant reçu le prix interdépartemental de l’innovation urbaine au début du mois.

Contactée mercredi matin, la mairie de Puteaux, menée par l’édile LR Joëlle Ceccaldi-Raynaud, n’a à cette heure pas encore répondu à nos sollicitations.
source :
https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/hauts-de-seine/copie-industriel-admirateur-du-fascisme-choisi-baptiser-passerelle-puteaux-1764621.html

L’Ami du Peuple contre les « financiers qui mènent le monde ».
• La première campagne antisémite des années 1930
• Laurent Joly
• Dans Archives Juives 2006/2 (Vol. 39), pages 96 à 109
Lire le dossier de Laurent Joly en cliquant sur le lien ci-après

https://www.cairn.info/revue-archives-juives1-2006-2-page-96.htm#

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4 Commentaires

  1. Mme le Maire de Puteaux devrait s’occuper des gamelles qu’elle trimballe.

  2. elie eliakim dit :

    De quoi susciter l’incompréhension DANS l’ opposition !

  3. gandilhon dit :

    Droit de Réponse

    Suite à un article de France 3 IDF du 18 décembre 2019 rédigé par Pierre de Baudouin, présentant François Coty comme «un admirateur du nazisme et du fascisme». Je me dois de partager à ce sujet quelques éléments de réflexion.
    Cet article s’inscrit dans un règlement de compte politique et ce,à 3 mois d’échéances électorales.Le choix du nom de la passerelle a été voté par le conseil municipal le 21 Février 2019 suite à l’adoption du procès-verbal du 13 Décembre 2018. Aucune voix sinon certaines abstentions ne se sont positionnées contre cette proposition. Cet article, à 3 mois des échéances électorales semblerait s’inscrire dans un règlement de compte politique.Du point de vue historique, cette période de l’entre-deux guerres possède un spectre politique très différent du nôtre.En faire l’objet d’interprétations hors de leur contexte est une façon de manipuler l’Histoire pour servir des intérêts personnels ne constitue pas une argumentation honnête aux yeux du public.En revanche, c’est l’occasion pour nous de développer le sujet en réponse.
    Avec son usine de conditionnement métallique installée à Puteaux,François Coty a joué un rôle économique et social important pour la ville. Les nombreux employés puteauliens ont pu bénéficier des avantages tels que:une crèche dans l’usine, les congés payés, le financement des études et la retraite bien avant 1936…Il finance avec son ami François Carnot Le Jouet de France qui ouvre ses portes en Janvier 1917. Cette usine est conçue pour les soldats handicapés parfois mutilés revenus du front. Ils fabriquent des jouets en bois pour les enfants,accompagné d’un menuisier formateur,afin de leur donner une perspective d’avenir professionnelle leur apportant ainsi une raison de vivre et de l’espoir.
    Il est pour le moins désolant de lire que mon aïeul ait pu être nazi. Soulignons qu’il était, avant toute autre chose nationaliste, anti-communiste et résolument germanophobe, comme la plupart des industriels de l’époque. La Solidarité Française est crée le lendemain de la nomination d’Hitler en tant que Chancelier fin janvier 1933 et cette organisation comptait plusieurs sociétaires de confession juives, unis par la peur qu’engendrait l’Allemagne nazie.A la mort de François Coty en Juillet 34, il est vrai qu’elle prend un tout autre visage sous l’égide du fascisant Jean Renaud.
    Le succès fulgurant de self made man dans une société figée et réactionnaire en feront le bouc émissaire « fasciste » idéal pour des milieux dirigeants qui n’ont jamais voulu l’accepter.
    Au tout début des années 20, Il se sent proche de Mussolini et de ses idées, séduit par l’ordre qu’il rétablit en Italie et qu’il verrait bien mettre fin au chaos qui règne en France à ce moment-là.Mais il s’en détourne avec la montée des « lois fascistissimes » de 1925 et 1926, supprimant son aide financière et coupant définitivement les ponts avec l’Italie fasciste.François Coty était un génie de la parfumerie et un homme d’affaire hors pair mais un piètre homme politique..Avant de découvrir son exceptionnel talent de parfumeur,il avait fait des études de journalisme. Il était influençable de par son histoire personnelle et son anti-communisme viscéral l’a amené à croiser des personnalités de mauvaise augure attirées par son argent et son pouvoir lié à ses journaux. Ces détracteurs vont utiliser ces vecteurs pour propager leurs idées nauséabondes.Et comme cité dans l’article «il est resté sans envergure dans le milieu nationaliste…». Il a eu des mots orientés dans son journal l’Ami du Peuple mais il s’en est excusé et demande qu’un communiqué public soit lu lors du congrès juif mondial du 8 septembre 1933 à Genève.Il rompt d’ailleurs à ce moment-là avec ces sulfureux personnages qui ne manqueront pas de le railler publiquement.Dès la création de son entreprise et jusqu’à sa mort, François Coty s’était entouré de nombreux collaborateurs de confession juive, impliqués et reconnus au sein de leur communauté religieuse.Benjamin Lévy fut à la direction de COTY Inc. à New York des 1910, fleuron de son
    empire industriel qu’il dirigera brillamment jusqu’après la seconde guerre mondiale.Tout comme Raymond Greilsamer qu’il fera revenir d’Allemagne en 1932 où la condition des juifs est menacée pour finalement l’envoyer en tant que directeur des ventes à NY.A l’annonce de la mort de mon aïeul le 25 juillet 1934, Monsieur Greisalmer prend un avion pour Paris afin d’assister aux obsèques et lui rendre hommage.Il fait partie des 4 personnes qui portent son cercueil.
    Mon grand-père Henri Roland Coty, petit-fils de François Coty, fonda l’association François Coty en septembre 2000. Elle avait entre autre pour but de rétablir la vérité sur le parcours hors norme de François Coty sans déni ni caricature. Mon grand-père fut résistant puis arrêté par les nazis et enfin déporté et torturé à Buchenwald puis à Dora-Bergen-Belsen. Il adorait son grand-père qu’il s’est appliqué à défendre contre les écrits abusifs ou manipulés sans jamais céder à la tentation d’omettre certains de ces mauvais choix politiques.
    Rédigée par Véronique Coty, présidente de l’Association François Coty le 20 décembre 2019

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