Affaire Médine : l’antisémitisme, stade suprême du cynisme

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ÉDITO. La venue du rappeur Médine aux universités d’été d’EELV ou de LFI n’est que la dernière manifestation de calculs électoraux écœurants. L’été de la honte…
Par Étienne Gernelle
Il n’y a donc rien qui les rebute, qui les dégoûte, aucune limite ? Si Europe Écologie-Les Verts, La France insoumise et le Parti communiste souhaitaient accueillir à leurs universités d’été (ou à la Fête de l’Huma) un rappeur qui a des choses à dire, il eût été extrêmement facile d’en trouver un qui n’ait jamais trempé dans l’antisémitisme. Mais non. Il leur fallait Médine, celui que les mots de l’islamisme – « crucifier les laïcards » – ne dérangent pas, celui qui s’essaya à la quenelle en soutien à Dieudonné, celui qui assista, dans « une démarche de chercheur », dit-il, à un meeting de l’antisémite patenté Kémi Séba… En réponse à l’essayiste Rachel Khan, qui s’interrogeait à raison sur ce choix, Médine qualifia cette dernière, dont le grand-père survécut à la Shoah, de « resKHANpée »…
Cela ne leur suffit pas ? Non, manifestement. Médine est toujours le bienvenu chez eux. Avec quelques voix discordantes, heureusement, comme celles des écologistes Karima Delli, Jeanne Barseghian et Pierre Hurmic. Mais, globalement, ces trois partis membres de la Nupes tiennent bon, se satisfaisant avec une facilité stupéfiante des explications vaseuses de Médine ou encore de la caution morale apportée au rappeur par Edwy Plenel.
Manipulation. Rien de tout cela n’est nouveau. On se souvient de Jean-Luc Mélenchon, en 2019, soutenant son ami Jeremy Corbyn, lequel était attaqué – à juste titre – par le grand rabbin du Royaume-Uni pour avoir laissé l’antisémitisme prospérer au sein du Labour. Mélenchon avait dénoncé « les ukases arrogants des communautaristes du Crif ». On se rappelle l’invitation lancée, l’an dernier, par les candidates LFI aux législatives Danielle Simonnet et Danièle Obono à ce même Jeremy Corbyn pour venir les soutenir. À quoi cela sert-il, à part à envoyer un signal à ceux qui sont obsédés par les juifs ? On n’oublie pas, surtout, que Jean-Luc Mélenchon avait suggéré, en 2021, l’existence d’une manipulation du pouvoir derrière l’attentat des Champs-Élysées, en 2017, et ceux perpétrés par Mohammed Merah, qui assassina, en 2012, des enfants parce que juifs à l’école Ozar Hatorah de Toulouse…
Est-ce à dire que les dirigeants de La France insoumise et de ses partis alliés, unis dans leur admiration pour Médine, sont antisémites ? Certainement pas. Y compris Jean-Luc Mélenchon, dont ce n’était a priori ni la culture ni la nature. Mais cela ne leur est pas nécessaire. Dans Réflexes primitifs (Payot, 2019), le philosophe Peter Sloterdijk analysait le rôle spécifique dans l’histoire des populismes des « désinhibitions cyniques ». Nous y sommes.
Petits appels du pied. Au sein de la gauche radicale, certains font ainsi commerce de l’importation électoraliste du conflit israélo-palestinien. L’an dernier, des députés issus de ces mêmes partis déposaient une proposition de résolution à l’Assemblée nationale condamnant l’« apartheid » pratiqué selon eux par Israël. La liste de ces petits appels du pied est désormais trop longue pour figurer dans un éditorial. Elle vient de loin. La stratégie du compagnonnage opportuniste avec les islamistes a été théorisée en 1994 par un trotskiste britannique, Chris Harman, dans un article au titre évocateur : « Le Prophète et le prolétariat ».
Cette absence de scrupules, au passage, traduit aussi un préjugé atrocement condescendant : il y aurait donc pour eux une population naturellement portée sur la détestation des juifs et que l’on pourrait séduire ainsi ? Jolie vision de la part de ceux dont cette gauche radicale tente de se faire le porte-voix…
L’affaire Médine sera bien sûr amortie, amoindrie, noyée par des déclarations apaisantes de l’intéressé et de ses amis. Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV, a déjà commencé, en tentant (sur France Inter) une consternante distinction entre l’antisémitisme tout court et un autre qui ne serait que de bêtise ou d’inculture. Et cela passe. Et c’est ainsi que l’on s’habitue… En cette époque de cancel culture, personne ne sera « annulé » pour cela. En attendant, la sandwicherie casher Mr. Shnitz de Levallois-Perret a été recouverte d’inscriptions antisémites la semaine dernière. L’été de la honte.
Source
https://www.lepoint.fr/editos-du-point/affaire-medine-l-antisemitisme-stade-supreme-du-cynisme-24-08-2023-2532627_32.php#xtmc=affaire-medine-l-antisemitisme-stade-supreme-du-cynisme&xtnp=1&xtcr=1

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