David Haziza, le prénom…… et le nom aussi

Par Meir Ben Hayoun

David Haziza, tu voudrais t’incruster dans des débats télévisés et interviews radiophoniques? Tu en as tout à fait la capacité. C’est certain qu’en tapant sur le gouvernement d’Israël en tant que Juif ès qualité, tu as tes chances, mais la concurrence est féroce. L’écrivaine Valérie Zenatti « accablée et tant inquiète pour ses amis de Gaza », elle est titularisée dans les débats de TV5. Si elle veut bien te céder sa place? Il faut des jeunes comme toi, dynamiques, sur ces plateaux TV, pas des Alain Dieckhoff ou Dominique Moïsi qui ont fait leur temps et qui endorment le public, ou un Ofer Bronchtein tout boursoufflé par je ne sais quoi.

Ou alors delphine horsvaleur la plus emblématique ? Si on évoque la delphine, peut-être que Maqueron te décernera la Légion d’Honneur pour tes « courageuses positions », comme à elle.
Tu préférerais un statut à la Finkielkraut avec une porte de sortie à l’académie française ? Lui aussi s’est mis à taper sur le gouvernement israélien « d’extrême droite ».

Vous jouez la même partition, grosso modo. Essayez tous de vous partager les tâches et l’exposition médiatique, histoire de ne laisser personne sur la touche.

Sinon, les relations de ton père, Frédéric Haziza de Radio J, certes, cela constitue un piston non- négligeable, un petit coup de pouce pour avoir ton nom dans les grands magazines comme le Point, mais je ne sais pas si cela t’aidera beaucoup. Tant que j’y pense, passe le bonjour à ton père. Quand nous étions adolescents, on était copains au mouvement sioniste, tu vois. Tu lui passeras aussi le bonjour d’Elie Enkaoua de Tekoa. A cette époque, je croyais que ton père allait faire l’Alyah avec nous. Tu serais né en Israël comme nos enfants et aujourd’hui, en train de faire tes réserves avec eux dans la Bande de Gaza ou au Liban. Ah oui, tu ne serais peut-être pas normalien. Quelle perte pour l’Humanité cela aurait été!

Les gars de ton âge ici en Israël combattent en ce moment sur le terrain. Deux sont récemment tombés, un de 22 ans marié depuis seulement 7 mois, et un de 20 ans. Toi, dans tes dernières interventions publiées dans la presse, tu retiens l’attention du public – vraiment, super réflexion:  » Ce qui se passe m’interroge et interroge mon judaïsme ». Ouah!!!!! Bravo pour l’enculage de mouches en plein vol.

Une petite recommandation, fais comme Nathan Devers, change de nom de famille. Lui s’appelait Nakache avant de se choisir Devers. Ce serait mieux pour toi. Ton nom de famille ne te va pas, ce patronyme de la grande et chaleureuse famille Haziza de Nedroma. Au passage, à Nedroma, les liens sont très anciens et nombreux ont été les mariages entre les Haziza et les Ben Hayoun. Le rabbin de la communauté juive de Nedroma, le Rav Itzhak Haziza, que Dieu venge son sang, a été bestialement assassiné dans un triple attentat arabe contre les Juifs en 1956. Toute la communauté juive a alors quitté Nedroma pour de meilleurs hospices. Il me semble que les Haziza en ce moment n’apprécient pas beaucoup de voir leur nom associé à quelqu’un qui parle de « faillite morale d’Israël ». Il ne faut pas leur en vouloir. Ils ne se rendent-ils pas compte que l’un d’entre eux est un grand esprit à haute conception morale. Ils ne te perçoivent pas à ta vraie valeur.

Et tant qu’on y est, ton prénom aussi, David, du Roi d’Israël qui a fait couler à flots le sang de ses ennemis sans état d’âme. Comme le raconte le Livre de Samuel, il les a passés au fil de l’épée par myriades. Criminel de guerre avec un mandat d’arrêt par la CPI.

Imberbe, à peine à l’âge de 12 ou 13 ans, David ne s’est pas contenté de mettre à Goliath à terre le laissant pratiquement mort. Cela ne lui a pas suffi. Il lui a coupé la tête. Et même après cela, il ne pouvait pas s’arrêter. Il a saisi la tête coupée de Goliath par les cheveux et l’a brandie devant les palestiniens pris de panique. Tu te rends compte de qui tu portes le prénom ? Toi? Tuer un palestinien qui n’a fait que nous défier ? Parce qu’il est costaud et grand de taille, lui couper la tête, la brandir et ensuite pourfendre les fuyards? Tu ne veux tout de même pas être identifié avec ce roi d’Israël dont la poésie proclame (Psaumes 18, versets 38 et 39):  » Je poursuis mes ennemis, je les atteins ; point de relâche que je ne les aie détruits. Je les abats, ils ne pourront plus se relever, ils gisent désormais à mes pieds. » Remets-toi du choc! Cela interroge ton judaïsme, n’est-ce pas?

Si nous, on faisait pareil aujourd’hui, avec l’actuel Gouvernement d’Israël « d’extrême droite aux projets criminels » comme tu le décris, la police militaire de Tsahal nous mettrait les menottes et on serait écroué en cours martiale.
Nous, les « messianistes aux projets criminels », en comparaison au Roi David, on est des pacifistes bon teint.

Reconnais-le, pour ce que tu prônes et cherches à représenter, ce prénom, David, est un boulet pour toi. Christian ou Tcha’bab t’iraient beaucoup mieux. Change d’identité. Tu serais en phase avec toi-même, plus souriant que tu ne l’es sur tes photos dans les magazines.

Pour finir, Israël, c’est grillé pour toi. Je ne crois que cela te chagrine outre mesure. Tu n’y vivras jamais et n’y seras pas enterré. Ce n’est pas toi qui as choisi de vivre en dehors d’Israël comme tu pourrais le penser. C’est la terre d’Israël qui ne veut pas de toi comme elle n’a pas voulu de delphine horsvaleur avant toi. Notre terre d’Israël chérie est sensible et ne digère pas tout. Elle est sélective.

Meir Ben Hayoun, Jérusalem

https://www.lepoint.fr/debats/david-haziza-ce-qui-se-passe-m-interroge-et-interroge-mon-judaisme-19-05-2025-2590002_2.php?

Chercheur et essayiste, David Haziza est normalien et docteur de l’université Columbia (New York). Il a enseigné l’histoire de l’Europe, la littérature française et le cinéma, et collabore à plusieurs revues et magazines. Il a publié Talisman sur ton cœur (Cerf, 2017), une exégèse du Cantique des cantiques, et Le Procès de la chair (Grasset, 2022), un essai sur le puritanisme contemporain