Sortie du livre de Jean-Marc DEDIDA « Maurras, un procès »

By  |  0 Comments

Jean-Marc Fédida (né le 28 novembre 1963 à Lyon) est un avocat français, fréquemment mis à contribution dans les affaires financières et pénales françaises. Il est notamment l’avocat d’Alain Madelin, partie civile dans l’affaire Clearstream 2. Il a assuré la défense de Madeleine Germon dans l’affaire de la profanation du cimetière juif de Carpentras, celle du Directeur Général Adjoint de l’Office Public des HLM de la Ville de Paris, de Didier Schuller etc…
Il assure depuis plus de 10 années la Défense du Canard Enchaîné, mais aussi d’autres organes de presse, notamment ceux du Groupe RENTABILIWEB. Il a développé son expertise dans le domaine de la protection de la e-réputation.
Lire ci-après l’article de CAUSEUR
Jean-Marc Fédida relate un procès emblématique de la Libération

“C’est la vengeance de Dreyfus !” Les livres d’Histoire retiennent ainsi l’exclamation de Charles Maurras à l’annonce de sa condamnation par la Haute Cour de Justice de Lyon, le 28 janvier 1945, à la réclusion criminelle à perpétuité assortie de l’infamante indignité nationale dont on reparle ces jours-ci. L’académicien, gloire célébrée par toute une génération intellectuelle bien au-delà des rangs monarchistes, fondateur de l’Action française, est alors accusé d’actes d’intelligence avec l’ennemi. L’objet du délit ? Il est rappelé avec une rigueur et une froideur professionnelle par Jean-Marc Fédida dans L’affaire Maurras : les éditoriaux que le patron de L’Action Française écrivit entre 1940 et 1943, appelant tantôt au rétablissement de la peine de mort systématique pour les communistes, tantôt au meurtre des gaullistes, livrant çà et là avec noms et force détails des Juifs – coupables à ses yeux de tous les maux et en premier lieu de celui du nazisme et de la défaite de 1940 – au bon vouloir de son lectorat. Voilà pour l’exposé des faits, que le procureur eut bien du mal à achever, interrompu par un monologue de plus de sept heures dans lequel l’accusé ferrailla uniquement sur le terrain des idées sans un regard sur les faits incriminés


Les mots font-ils plus de mal que les balles ? Métaphoriquement, c’est incontestable. Mais en temps de guerre, doit-on d’abord blâmer les discours exaltés ou la réaction d’un auditoire chauffé à blanc qui se montre particulièrement réceptif ? Ou les deux, c’est à dire celui qui parle et ceux qui l’écoutent. Savoir si la responsabilité incombe au donneur d’ordres ou aux exécutants est une question qui ne trouvera jamais de réponse univoque. Celle que fournit le tribunal de Lyon en janvier 1945 ne devait en rien faire jurisprudence. Comme n’a cessé de le rappeler son président, le procès Maurras est celui des faits, non des idées, n’en déplaise à l’accusé. Seuls les faits furent examinés, sans une considération pour les « théories politiques » de ce dernier.
Et il fut décidé, laconiquement, que dans les colonnes de l’Action Française se trouvaient de véritables actes de collaboration. A ces mots, Maurras déstabilisé rejeta la responsabilité sur les seuls exécutants, prétendant n’être qu’une voix : celle d’une idéologie complexe à laquelle il s’agrippa de manière délirante jusqu’au bout, puisqu’il rédigea pas moins de sept ouvrages en prison, sans la moindre remise en question.
Il se flattait de manier la rhétorique comme un sabre, et à bien des égards ne se méprenait pas. Mais sa passion pour la Fille aînée de l’Eglise, la France des clochers et des rois catholiques, dépassait de loin la raison. Dans une extase frisant l’érotomanie, il prétendait être le seul amant de la langue française, violée impunément par ses adversaires politiques. La République lui cracha au visage pour toute réponse, lui refusant le droit de mourir debout. L’Académie française, quant à elle, déclara le fauteuil de Maurras vacant et réserva à l’épée de l’Immortel le même sort qu’à celle du capitaine Dreyfus.
Elle la brisa.
Jean-Marc Fédida, L’affaire Maurras, L’Âge d’homme.
lire l’article de CAUSEUR en cliquant sur le lien ci-après
http://www.causeur.fr/maurras-fedida-proces-31287.html

lire l’article de Jean-Paul Enthoven dans le POINT du 25 Novembre 2011 en ENTIER en cliquant sur le lien ci-après

http://www.lepoint.fr/livres/faut-il-relire-maurras-25-11-2011-1400509_37.php

Extrait de cet article :
Vichyste
Il se trouve, de plus, que Maurras, malgré son antigermanisme, devint de facto le complice de l’occupant à partir de 1940 et qu’il inspira la « révolution » vichyste. Mais cette évidence ne gêne pas ses lointains épigones, qui nuancent et corrigent : le nationalisme de Maurras aurait été, d’emblée, suspect aux yeux des nazis. Pour preuve, telle longue dépêche du conseiller Schleier, ou telles confidences d’Otto Abetz, dénonçant l’attitude « anti-allemande » de l’auteur de Mademoiselle Monk. Michel Déon, fidèle d’entre les fidèles, se souvient même que son maître, qu’il accompagnait à Lyon en 1942, salua le corps d’un résistant abattu par la Gestapo. Dans l’ordre de la théorie, on pourrait alors résumer cette thèse comme suit : Maurras fut, par son enseignement, le plus solide rempart contre la tentation fasciste d’une génération subjuguée. Sans lui, sans son « politique d’abord », l’infamie eût été plus radicale – et les dérives d’un Drieu La Rochelle, d’un Brasillach, d’un Rebatet ne se conçoivent, précisément, qu’à partir de leurs ruptures avec les principes de ce qu’ils appelaient l' »inaction française ». Quant à la fameuse « divine surprise », rien de plus, paraît-il, que ce qui fut espéré par les hommes de la Restauration quand ils durent composer avec les vainqueurs de Waterloo afin d’adoucir les traités de 1815. Cette argumentation, sans grande nouveauté, surprend toujours. Pourtant, j’ai souvent entendu Maurice Clavel – ce résistant dont le journalisme transcendantal devait autant à Maurras qu’à Bernanos ou à Péguy – défendre la même thèse, et s’en servir, mutatis mutandis, pour expliquer comment Lacan (fin lecteur de Maurras) sut retenir par sa position de maîtrise la génération gauchiste des années 70 tentée par le terrorisme. On peut ironiser devant ces sophistications infalsifiables. Il serait injuste de ne pas tenir compte de la dose de vérité qu’elles recèlent.
Demeure l’essentiel : comment peut-on encore être maurrassien ? Et quelle est, à l’heure de la mondialisation et des flux migratoires, la pertinence d’une oeuvre bâtie pour des complexions frileuses ? Sur ce point, L’Herne se contente, avec prudence, de présenter un dossier assez complet : de la condamnation pontificale de 1926 aux polémiques avec Barrès, de l' »empirisme organisateur » au « catholicisme sans la foi », de Frédéric Mistral à Léon Daudet, de Pierre Boutang à Jacques Bainville ou Daniel Halévy, du prisonnier de Clairvaux au disciple d’Auguste Comte. Il en ressort un Maurras hypostasié en réincarnation de Socrate – le Socrate de l’Apologie, bien sûr, le martyr des démocrates. Ce fantasme est indestructible. Et, heureusement, inoffensif.


Extrait de la fiche WIKIPEDIA sur l’ ACTION FRANCAISE
• Dès sa création, l’Action française proclame un antisémitisme virulent contre Dreyfus. Charles Maurras théorise une nouvelle forme d’antisémitisme, l’« antisémitisme d’État » pour qui, cette forme serait différente de l’« antisémitisme de peau ».
• La Grande guerre modifie quelque peu ce statut. C’est la naissance des qualificatifs « juifs bien nés » et « juifs mal nés ». Les premiers sont les “patriotes” ou “Juifs français” qui ont montré qu’ils pouvaient « s’amender » du fait de leur engagement pendant la guerre, les seconds sont les Juifs étrangers. Cette distinction est appréciée par la plupart des « israélitesF 1 » : les Juifs français pensent en effet avoir acquis « un titre de propriété [français] définitif » pour eux et leur descendance. Ainsi, l’antisémitisme de l’Action française évolue en déplaçant sa cible à l’extérieur des frontièresF 3. Un exemple de ce changement : attaqué sur son extrémisme dans les années 1930, L’Étudiant français définit l’antisémitisme par le « refus » d’ouvrir « tout grand aux juifs internationaux les avenues du pouvoir en France ». L’antisémitisme d’État de l’Action française finit ainsi par influencer certains milieux du judaïsme français ; selon Catherine Nicault, spécialiste de l’histoire des Juifs en France dans l’entre-deux-guerres, le regard des « Français israélites » à l’égard de cet « antisémitisme d’État » y est sensible voire transparent : « Hormis les antifascistes qui considèrent que les disciples de Maurras comptent au nombre des “pires ennemis des Juifs”, les “Français israélites” ont tendance à ne pas les mettre tout à fait dans le même sac que les autres. Il est apparu que la minorité juive “autochtone”, écrit-elle, profondément patriote, fait preuve d’une sensibilité, voire d’une porosité sans équivalent à l’égard des thématiques du nationalisme intégral et de l’AF. D’où des attitudes de compromis, une attirance, voire une imprégnation dans certaines de ses marges. »
• Dans les années 1930, l’argumentaire de Charles Maurras qui souhaite se démarquer de l’Allemagne hitlérienne se réfère à l’Histoire mais demeure antisémite. Ainsi comme le souligne Carole Reynaud-Paligot, Maurras fait la distinction « entre l’antisémitisme allemand dont il expliquait la “tradition de brutalité” par les fondements biologiques de la notion de race, par l’idéologie de la race pure et un antisémitisme français à qui il déniait son caractère raciste en raison de son absence de fondements biologiques ». Afin d’imager ses propos, elle donne une citation de Maurras qui fait la lumière sur l’antisémitisme de l’Action française : « En pleine Occupation, nous avons publiquement dit au professeur anthropologue et philoboche Montandon que nous n’étions pas pour la petite sauce raciste de son “antisémitisme de peau”. Il ne s’agit pas de dire “Mort aux Juifs” qui ont droit à la vie comme toutes les créatures mais : “À bas les Juifs” parce qu’ils sont montés trop haut chez nous. Notre antisémitisme d’État consiste à leur reprendre. à leur interdire ce qu’ils ont pris de trop et en premier lieu, la nationalité française, alors qu’ils en ont une et indélébile, et qu’ils gardent toujours en fait. Qu’elle leur suffise donc ! Elle eut ses gloires et elle vient de récupérer un beau territoire au Proche-Orient […] ».
• Charles Maurras est conscient du problème éthique posé par l’antisémitisme biologique : en 1937, il affirme : « L’antisémitisme est un mal, si l’on entend par là cet antisémitisme de peau qui aboutit au pogrom et qui refuse de considérer dans le Juif une créature humaine pétrie de bien et de mal, dans laquelle le bien peut dominer. On ne me fera pas démordre d’une amité naturelle pour les Juifs bien nés. »
• Malgré le discours violemment antisémite produit par l’Action française sous l’Occupation, Maurras déclare, lors de son procès en 1945, ignorer les pratiques d’extermination dans les camps, et tient des paroles de compassion pour les victimes. En 1952, « hanté par la crainte de nouveaux cataclysmes », Maurras désignera « les camps d’extermination allemands ou “moscovites” comme les lieux où risquent de périr les nations » et « en constate l’horreur à l’échelle de l’Histoire, mais sans en percevoir la spécificité génocidaire ».

happywheels

Publier un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.