Mohamed Louizi : « Pourquoi j’ai quitté les Frères musulmans »

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Mohamed Louizi : « Dans un quartier, où rien ne se faisait pour la jeunesse, lorsque des islamistes proposaient des activités, mes parents considéraient les frères comme une chance »
Mohamed Louizi est un ancien membre du mouvement marocain Attawihid wal’Islah, du PJD et de l’UOIF, ex-président des Étudiants musulmans de France (Lille) Il est ingénieur. Il anime depuis 2007 le blog « Écrire sans censures ! ».

Mohamed Louizi raconte dans « Pourquoi j’ai quitté les Frères musulmans » ses quinze ans de militantisme dogmatique, et revient sur les découvertes, les doutes et les interrogations qui ont précédé son désengagement ; il décrypte la stratégie d’islamisation globale non-déclarée des Frères musulmans en France et en Europe, avant de conclure sur son retour vers un islam éclairé et apolitique.

Atlantico : Comment êtes-vous devenu un « frère » dès l’âge de 13 ans ?
Mohamed Louizi : Mon rapport à l’islamisme des Frères Musulmans remonte au moins à mon adolescence. D’abord, ma famille à Casablanca fut très marquée et influencée par le wahhabisme de conquête et l’idéologie frériste jusqu’au milieu des années 90. Dès 1991, lorsque j’étais en 6ème, j’avais 13 ans, j’ai intégré les cercles éducatifs de certains mouvements islamistes marocains, affiliés idéologiquement aux Frères Musulmans.
Ainsi, durant une quinzaine d’années, j’ai acquis les standards de l’idéologie frériste et y juré allégeance, et suis devenu très vite un acteur de la diffusion dans les milieux scolaires et universitaires.
A mon arrivée en France en 1999, j’ai rejoint les Frères Musulmans, sous la bannière de l’UOIF (Union des Organisations Islamiques de France).
J’ai occupé plusieurs postes de responsabilité et suis devenu président des Etudiants Musulmans de France de la section de Lille et membre des instances nationales de ce syndicat confessionnel. Localement, en métropole lilloise, j’ai cumulé plusieurs responsabilités, à la mosquée de Villeneuve d’Ascq et à la mosquée de Lille-Sud qui sont, toutes les deux gérées et dominées par les Frères Musulmans.
Il est évident qu’à l’âge de 13 ans, je n’étais pas en mesure de choisir ni de donner un sens à mon engagement. Dans un quartier populaire très pauvre, exposé à la délinquance et au décrochage scolaire, où rien ne se faisait pour la jeunesse, lorsque des islamistes proposaient des activités de soutien scolaire et d’autres animations religieuses et sportives, mes parents appréciaient l’encadrement et considéraient les frères comme une chance. Je le pensais aussi, à tort !

Qu’est-ce que le projet Tamkine ?
Dans tous les pays où se trouvent des Frères musulmans, en Orient comme en Occident, le projet islamiste est le même depuis la création de la mouvance par Hassan Al-Banna en 1928. Il s’agit, ni plus ni moins, de rétablir le califat islamique aux frontières historiques, y compris là où l’islam avait une présence en Europe. Ce projet politique a un nom : le projet Tamkine. C’est un plan stratégique visant à atteindre à terme le sommet du pouvoir politique pour que l’islam, tel qu’il est compris par les Frères musulmans et leurs idéologues, domine totalement l’Etat et la société et impose sa loi religieuse totalitaire, rétrograde et liberticide.
Pour y arriver, dans chaque pays, les stratèges de la mouvance ont imaginé quatre étapes : Premièrement, diffuser l’islam frériste par toutes les voies possibles et notamment par la voie des mosquées ; deuxièmement, sélectionner les ressources humaines nécessaires, en particulier des jeunes, pour les endoctriner dans des structures associatives et scolaires privées afin qu’ils infiltrent toutes les sphères du pouvoir ; s’assurer que l’infiltration opérée couvre toutes les sphères et, le cas échéant, corriger les écarts de projection constatées et enfin, prendre le pouvoir suprême. En 1992, la police égyptienne avait découvert lors d’une perquisition un plan Tamkine secret, appliqué à l’Egypte. En 2012, le frère musulman Mohamed Morsi est devenu président.

Vous avez consacré un chapitre à l’implication des Frères musulmans en Europe ? Comment font-ils pour recruter ? Quels rôles ont-ils ? Existent-ils des dangers à cette présence en Europe ?
En Europe et en Occident, le projet Tamkine se présente avec un préalable supplémentaire. Car si le monde arabo-musulman est considéré déjà comme un « territoire » acquis. En Occident, cela n’est pas le cas. Les Frères musulmans, présents sous la bannière de la FOIE (Fédération des Organisations Islamiques en Europe) s’emploient, depuis les années 1980, sur le vieux contient à acquérir divers « territoires » privés, avec l’argent venant des pays du Golfe essentiellement pour inscrire définitivement leur récit islamiste comme élément du récit national de chaque pays de l’Europe.
Cette opération s’appelle le « Tawtine ». Elle est exécutée par la construction de lieux de culte, de mosquées-cathédrales, d’acquisitions immobilières diverses et variées, de construction d’établissements scolaires privés, etc.
En plus de toutes ces structures, les Frères musulmans développent tout un réseau national et européen composé de milliers d’associations de femmes, de jeunes, d’étudiants, d’imams, de médecins, de journalistes, d’avocats, d’universitaires, de militants contre l’islamophobie, etc. Les Frères musulmans sont une organisation qui modernise son action stratégique continuellement depuis maintenant 88 ans !
Avant, la diffusion de l’idéologie se faisait selon un modèle archaïque sous forme d’une « toile d’araignée » en prenant le risque de s’affaiblir voire de disparaître, en cas de coup dur. Parce que couper la tête de l’araignée frériste se résumerait à tuer toute la structure. Aujourd’hui, cette manière de fonctionner est dépassée. Place désormais aux organismes fréristes sous forme « d’étoiles de mer ». Parce que couper le bras d’une étoile de mer, celle-ci ne meurt pas. Au contraire, elle se développe un nouveau bras. Mieux encore, le bras coupé se transforme, à son tour, en une nouvelle étoile de mer autonome et ainsi de suite, dans une sorte de multiplication effrayante et à l’infinie. Si dans chaque étoile, les frères placent seulement quelques membres porteurs du virus islamiste et très influents, cela suffit pour contaminer celles et ceux qui sont tout autour. L’infiltration se passe sous ce modèle efficace.
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Chakib Benmakhlouf, ex-président de la FOIE, avait déclaré, dans une interview au journal londonien arabe Asharq Al-Awsat, le 20 mai 2008, je traduis : «Au sein de la FOIE, nous avons un plan d’action, nous avons un plan d’action sur 20 ans; sur le court terme, le moyen et le long terme. Certains événements, malheureusement, se déroulant de temps en temps, influent négativement sur l’avancement de notre action. Certains musulmans se sont vite sentis attirés vers des combats marginaux et cela perturbe notre plan d’action global.» Avec de telle déclaration, l’Europe devrait peut-être commencer à se poser les bonnes questions, à l’image du gouvernement britannique qui commence à bouger depuis le 17 décembre 2015. Car au sein de la FOIE, comme au sein de l’UOIF, les frères conduisent secrètement le même projet. Leur réseau s’étend et gagne en influence.
A l’échelle de l’Europe, les frères sont consultés, comme interlocuteurs, par les instances européennes. Leurs organisations sont reconnues et même financées par les deniers de l’Union Européenne. Je donne l’exemple du FEMYSO (Forum of European Muslim Youth and Student Organisations) qui est le bras frériste s’occupant des jeunes et des étudiants. Cette organisation reçoit tous les ans de l’argent de l’Europe pour ses activités. Elle est affiliée à l’échelle mondiale à l’autre organisation frériste l’IIFSO (International Islamic Federation of Student Organizations), domiciliée à Istanbul en Turquie. Dès l’élection de Mohamed Morsi comme président de l’Egypte en 2012, l’ex-président de l’IIFSO, Abdel Ati, a été choisi directeur de son cabinet présidentiel !

source :
http://www.atlantico.fr/decryptage/interview-mohamed-louizi-pourquoi-j-ai-quitte-freres-musulmans-editions-michalon-2552127.html/page/0/1

happywheels

3 Commentaires

  1. Cathy dit :

    Merci à la LDJ pour cet article édifiant sur ce qui se passe réellement sur le sol français… Il y en a combien des Mohammed Louizi en France qui cherchent à établir un califat et nous soumettre à leurs dictats !!!

  2. Peuimporte dit :

    je propose de rebaptiser la Place de la République en Place Hassan el Banna !

    • capucine dit :

      la Place de la République est devenu un lieu de recueillements depuis
      l’attentat de Charlie hebdo …la statue s’est transformée en mausolée !
      quelle tristesse !!

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