Islam radical à Molenbeek : tout était écrit depuis dix ans

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Hind Fraihi, journaliste qui avait dénoncé dès 2006 la radicalisation à Molenbeek
Dans « En immersion à Molenbeek » publié en 2006, Hind Fraihi décrivait déjà les processus de radicalisation inquiétants à Molenbeek (Belgique) où elle s’était installée pendant deux mois. Dix ans plus tard, l’enquête sur les attentats du 13 novembre a démontré le rôle central de ce quartier multiculturel et populaire de la banlieue de Bruxelles, où de nombreux terroristes ont vécu et tissé des liens. Dédaignée à l’époque, cette enquête visionnaire est rééditée*.

Que s’est-il passé lors de la publication de votre enquête en 2006 ?
HIND FRAIHI. A la sortie de mon livre, il n’y a eu aucun débat sur son contenu. Je n’ai pas été prise au sérieux, ni par le maire de l’époque, ni par les politiques, ni pas les services de police et de renseignement. Tout le monde s’est dit que j’exagérais. Force est de constater que le constat dressé en 2006, qui comportait déjà tous les signaux d’alerte, n’a pas été entendu. Nous avons raté une chance de comprendre ce qu’il se passait, d’y réfléchir. Nous n’avons pas voulu voir.

Avez-vous été surprise de découvrir que l’enquête sur les attentats de Paris amène à Molenbeek ?
Je n’ai pas été vraiment surprise de cette connexion, d’autant qu’il y a eu des précédents. Les attentats de Madrid en 2004, l’attaque au Musée juif de Bruxelles en 2014, l’attaque du Thalys en 2015 : à chaque fois, nous avons découvert que les assaillants avaient transité par Molenbeek. Ce qui m’a véritablement surprise, par contre, c’est l’ampleur de ces attaques.

Quel est votre constat aujourd’hui ?
Il y a dix ans, je pouvais voir des livres pro-djihad sur les étagères des librairies, j’entendais des prêches extrémistes dans des mosquées, des recruteurs abordaient leurs jeunes recrues dans la rue ou dans le métro. C’était tangible. Aujourd’hui, les choses ont bien changé, tout est plus dissimulé, plus virtuel : les recrutements ne se font plus au grand jour, mais sur Internet. Il est donc beaucoup plus difficile d’identifier et de combattre les comportements à risques. Les raisons du djihad ont également évolué : en 2006, les jeunes candidats évoquaient la Palestine, l’Irak, l’Afghanistan. Aujourd’hui, c’est la Libye ou la Syrie. Mais, au fond, c’est toujours le même moteur : le sentiment que le monde est indifférent aux souffrances de ces pays. Enfin, j’observe également une évolution dans le profil des candidats au djihad : on voit désormais certains jeunes diplômés ou ayant un emploi. Ce n’était pas le cas auparavant.

Que faudrait-il faire ?
Lors de mon immersion, j’avais pu constater l’existence de ce que j’ai nommé « une industrie de l’intégration », avec pléiade d’associations se donnant pour objectif d’intégrer les jeunes. Avec le succès que l’on connaît… Aujourd’hui, je crains qu’on ne soit passé à l’ère de « l’industrie de la déradicalisation ». Je crains que les résultats ne soient guère plus efficaces. En revanche, au niveau international, on peut déjà modifier en profondeur nos alliances diplomatiques. On ne peut plus continuer comme avant, avec l’Arabie saoudite notamment. Sur le plan intérieur, il faut enfin proposer un destin commun à ces jeunes issus de l’immigration. On les a trop longtemps négligés, niés. Il faut arrêter de monter des projets « pour » les jeunes, il faut faire « avec » les jeunes, ce qui est très différent.

Etes-vous plus écoutée aujourd’hui ?
Oui. Hélas, oui. Mais notre aveuglement nous a coûté cher, tellement cher…

* « En immersion à Molenbeek », de Hind Fraihi, 238 pages, éditions La Différence.
Source :
http://m.leparisien.fr/faits-divers/islam-radical-a-molenbeek-tout-etait-ecrit-depuis-dix-ans-16-03-2016-5631413.php#xtref=https://www.facebook.com

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2 Commentaires

  1. Golmon dit :

    Les flamands pas roses du tout ont bien compris que si ils ne voulaient pas devenir un belgistan nouvelle province du maghreb ils devaient faire cessession …on les comprend
    Certes , ce sera un peu plus complexe de trouver du ras el anout pour parfumer le bouillon du couscous , mais la tranquillité à un prix, ils pourront toujours le commander sur Amazon

  2. Olivier dit :

    Monter des projets avec ces jeunes, mais qui va vouloir faire ça ? A un moment, il faut aussi se prendre par la main.

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