Pourquoi le parti néo-nazi Aube dorée est-il si populaire en Grèce ?

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En Grèce, le parti néo-nazi Aube dorée est devenu en quelques années la troisième force politique du pays. Ce groupuscule, la journaliste Angélique Kourounis le connait bien. Depuis 2009, elle suit tous ses agissements et assiste à son ascension. Son enquête prend la forme d’un film: “Aube dorée : une affaire personnelle”, un documentaire qui cherche à décrypter ce qu’il se cache dans l’esprit d’un membre d’Aube dorée.
“Mon homme est juif, un de mes fils gay, un autre anar et moi féministe de gauche, fille d’immigré. Si Aube dorée vient aux affaires notre seul problème sera dans quel wagon nous monterons”. C’est par cette formule que commence le documentaire Aube dorée, une affaire personnelle, réalisé par Angélique Kourounis. Journaliste pour plusieurs médias francophones (Radio France, Charlie Hebdo, Reporters Sans Frontières), réalisatrice et auteure (Visages de la crise : nous gens du Sud, pauvres et fainéants), habitant un quartier populaire d’Athènes, elle observe la crise grecque au quotidien depuis de nombreuses années.
Que se passe-t-il dans la tête du néonazi de tous les jours ? C’est ce qu’a cherché à savoir Angélique Kourounis en retraçant l’ascension de ce parti, qui se pose en victime du système, à travers ses craintes, ses obsessions et sa violence. Un groupuscule qui n’avait jamais dépassé les 0,1%, jusqu’en 2012 où Aube dorée fait une percé spectaculaire et obtient près de 7% des voix aux législatives anticipées, et fait élire 18 députés au Parlement. Une ascension facilitée par un contexte de crise économique et sociale violent en Grèce.
Le film se ferme sur une note pessimiste : Aube dorée attend son temps elle sait qu’elle va pouvoir bénéficier d’un système qu’elle critique. En Grèce, le documentaire n’a été diffusé que dans une seule salle, les autres ayant refusé, par peur. Une crainte légitime face aux menaces qu’ont subi la réalisatrice et son équipe. Sélectionné en mars dernier au Festival de Thessalonique, Aube dorée, une affaire personnelle est avant tout projeté dans un cadre associatif et connait un grand succès. Une question revient alors souvent dans les débats qui suivent : que faire ? En France, ce sont pour le moment les cinémas d’art et d’essai Utopia qui diffusent le film, sa sortie nationale n’est pas encore prévue. Entretien avec sa réalisatrice Angélique Kourounis.

Comment est né Aube dorée ?
Angélique Kourounis – Aube Dorée a été fondé en 1980 par Nikolaos Michaloliakos. Mais à l’époque, ce n’était qu’un mouvement. C’est en 1992 qu’il devient un parti politique. Aube Dorée est né d’une nostalgie des colonels et d’Adolf Hitler. Dans les années 1990, la crise macédonienne éclate en Grèce, et le pays prend un tournant nationaliste. La gauche, le monde politique, et les intellectuels ont laissé Aube dorée s’approprier le drapeau grec qui est devenu un signe très fort de ralliement au parti. Au départ, ils étaient très peu nombreux, c’était de l’ordre du risible, lorsqu’ils organisaient des rassemblements, ils étaient une vingtaine au maximum. Aujourd’hui, ils sont plusieurs milliers, donc la question est de savoir ce qu’il est arrivé pour qu’ils passent de 0,2% à presque 7% des voix (6,9%), et donc 18 députés. Un vote de conviction et non pas contestataire, qui s’est confirmé à quatre reprises (entre 2012 et 2015).
Pour beaucoup de politologues, Aube dorée n’aurait pas eu cet ordre de grandeur s’il n’y avait pas eu la crise. De quelle crise parle-t-on ? La Grèce est frappée par une crise à la fois financière, politique, et sociale. Mais dans ces périodes, les gens ont tendance à voter pour la droite. Et dans un pays comme la Grèce, qui a connu deux dictatures une guerre civile, deux guerres balkaniques, qui a perdu une part importante de sa population durant la Seconde guerre mondiale, et qui vit dans le souvenir de patries perdues, toute cette histoire douloureuse irrigue Aube dorée et lui confère une telle importance que le parti est en constante augmentation.

Comment définissez-vous Aube Dorée ?
Le parti lui-même se définit comme une association “populaire”, ce qui renvoie davantage à une notion de gauche. Or, c’est clairement un parti néo-nazi. Quand j’ai commencé à enquêter sur Aube dorée, il y avait des affiches ou des livres du IIIe Reich un peu partout dans leur local. En 2010, Nikolaos Michaloliakos, le fondateur du parti, a fait un salut nazi au Conseil municipal d’Athènes. Ce sont des gens qui soutiennent l’Holocauste, le racisme, le sexisme, et l’homophobie.
Quelle stratégie a mené ce parti à son succès ?
Aube dorée organise sa propagande sur Internet, via les réseaux sociaux. Le soir où ils ont détruit tous les stands de vendeurs ambulants, ils ont filmé l’action et l’ont diffusée sur Youtube. De même lorsqu’ils sont allés dans un hôpital pour vérifier les papiers d’identité des infirmières, pour voir s’il n’y avait pas d’étrangères. A chaque fois, leur stratégie c’est de mettre les vidéos de leurs actions sur Internet pour pouvoir surfer sur le registre suivant : “L’Etat ne fait rien, nous on est là on agit”, et ça fonctionne.
Ils ont pris l’habitude d’organiser des actions de terrain comme la distribution de nourriture ou les collectes de sang, uniquement à destination des Grecs, à l’exclusion de tout étranger. La Grèce est un pays qui manque cruellement de sang, beaucoup d’associations ont pris l’habitude de constituer des banques de sang à leur nom, mais eux ont des cartes de donneurs d’aube dorien. L’association des médecins d’Athènes a réagi en faisant un communiqué expliquant que le sang va bien à toute personne qui en a besoin, qu’elle soit grecque ou non.


Vous montrez qu’il y a un certain laisser faire de la part des autorités publiques, un policier interviewé à visage masqué parle même de collusion. Aube dorée est-il arrivé à infiltrer les forces de l’ordre ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes, 20% des forces anti-émeutes d’Athènes et sa banlieue votent Aube dorée. Certains ont même pactisé avec les agresseurs du mouvement lors d’attaques envers les migrants, comme le révèlent des témoignages. Le commissaire européen des droits de l’homme , Nils Muiznieks, est le seul responsable politique qui a pris un engagement ferme contre Aube dorée en revoyant le gouvernement face à son inefficacité concernant la lenteur des jugements des crimes des militants envers les migrants et l’impunité de la police.
Cela fait désormais 115 jours que le procès de l’ensemble des députés d’Aube dorée de la période 2012/2013 et du fondateur du parti, Nikolaos Michaloliakos, a débuté, dans le but de montrer que c’est une organisation criminelle construite de façon pyramidale. Un procès déclenché suite au meurtre de Pavlos Fyssas (un rappeur militant antifasciste) le 17 septembre 2013 par un militant d’Aube dorée, l’émotion populaire, à l’époque, avait était très grande. Le gouvernement a eu très peur que cela déclenche des affrontements. Le ministre de l’Intérieur, Nikos Dendias, a tapé du poing sur la table en expliquant qu’il n’était pas question de laisser agir impunément ce parti : “J’ai sorti les dossiers d’Aube dorée et je les ai remis à la justice”, a-t-il déclaré. Bien que ce procès soit une très bonne chose, on peut s’interroger sur le fait que, ce soit l’exécutif qui transmette ces dossiers au pouvoir judiciaire, ce qui traduit en quelque sorte un dysfonctionnement des institutions démocratiques de l’Etat. Pourquoi les plaintes déposées dans les commissariats n’ont pas abouti ? Ce procès ne reste pas moins une chose formidable. La partie civile est constituée de la famille du rappeur, de syndicalistes agressés, et de migrants victimes d’attaques. Et leurs avocats travaillent bénévolement, tandis qu’en face, les députés d’Aube dorée ont tout un panel d’avocats engagés comme conseillers, et qui reçoivent donc un salaire du Parlement.


En novembre 2013, deux militants d’Aube dorée sont assassinés en représailles au meurtre de Pavlos Fyssas, votre documentaire révèle comment cela a contribué à forger une image de martyr…
Cet assassinat est en effet un gros point noir. L’enquête piétine, nous n’avons pas davantage d’informations à ce sujet, et Aube dorée exploite ce flou. L’exécution de ces deux jeunes militants a offert à Aube dorée des martyrs, et le parti joue la carte des prisonniers politiques concernant l’emprisonnement des députés. Tout ça a été exploité au-delà de l’acceptable et ça été une catastrophe tactiquement pour le gouvernement en place.
Comment expliquez-vous que la violence soit inhérente à Aube dorée ?
Ici, la violence est une arme politique. J’ai même vu de la peur dans les yeux de certains militants du parti. Plus d’une fois, mon équipe et moi-même avons été pris à partie lorsque nous venions filmer des manifestations publiques alors que nous avions les autorisations. Deux de mes caméramans ont été agressés et ne voulaient plus venir couvrir Aube dorée. Mon co-auteur, Thomas Iacobi, et moi avons dû filmer, mais nous avons été également agressés, comme on peut le voir dans le film.
Leurs slogans ou leurs emblèmes sont également très violents : “Sang, honneur, Aube dorée”, “Chiens rouges, cette terre ne vous appartient pas”, “Hache et feu aux chiens rouges” ou encore “De la merde sur la tombe d’Ataturk”. Ces formules font référence à la guerre gréco-turque ou à la guerre civile, un symbole aussi bien repris par la droite que par la gauche.

Dans le documentaire, il y a une scène très forte où un cadre du parti oublie que son micro est encore ouvert et briefe discrètement ses militants sur comment éviter de tenir des propos racistes ou négationniste devant les journaliste et confie qu’il est arrivé à vous manipuler… Comment êtes-vous arrivée à faire en sorte que les militants acceptent votre présence lors des manifestations et à obtenir des interviews ?
Ils m’ont accepté mais je n’ai jamais gagné totalement leur confiance pour autant. Je ne leur ai pas menti, je n’ai jamais tourné en caméra cachée, et je ne leur ai jamais dit que j’adhérais à leurs valeurs. Dès le début, je leur avais bien expliqué que je cherchais à comprendre ce qu’il se passe dans leurs têtes et pourquoi, malgré tout le déballage médiatique qu’il y a eu après la mort de Pavlos Fyssas, Aube dorée continue de bénéficier d’une certaine aura.
Nous avons commencé à tourner en 2009, nous nous sommes rendus à toutes les manifestations petites ou grandes, et à force, ils nous reconnaissaient. Ce n’était pas un travail d’immersion, mais plutôt d’apprivoisement, sans pour autant chercher à les dompter, mais on a fini par faire partie des meubles. Ce sont des gens d’un sexisme ahurissant, donc je ne leur inspirais pas beaucoup de méfiance. Mon co-auteur, Thomas Iacobi, est allemand, il est grand et blond, alors c’était un ticket d’entrée finalement, dès le départ ils lui ont dit : “Ah mais on a des idées en commun alors…” Et il est vrai que l’on a laissé planer un certain flou.
Je pense avoir bénéficié du timing. Après le décès de Pavlos Fyssas, Aube dorée a voulu redorer son image et montrer que ses rangs ne sont pas composés de monstres. Et comme je les accompagnais depuis 5 ans déjà, ils m’ont laissé faire le film.

Comment les militants d’Aube dorée ont-ils accueilli le résultat final du documentaire ?
J’ai reçu des menaces sur les réseaux sociaux, certains ont promis de me loger une balle dans la tête, d’autres, me souhaitent d’avoir un cancer de l’utérus, toujours via des comptes anonymes. Et nous sommes obligés de prendre quelques mesures de sécurité. Lors de la première projection à Athènes au cinéma Microcosmos, le seul qui, jusqu’à présent, a eu le courage de projeter le film, notre avocat a prévenu le commissariat de quartier . Le film a été entièrement financé grâce à une opération de crowdfunding (financement participatif, ndlr), mais au bout des cinq premiers jours, la plateforme a été victime de cyber-attaques et nous n’avons pas pu mener à terme cette opération. Il a fallu se débrouiller autrement, avec des bouts de ficelle. De même, notre page Facebook a été attaquée. Nous prévoyons d’écrire un livre dont les fonds seront reversés aux avocats de la partie civile, et qui traitera entre autre de la pénétration d’Aube dorée dans les écoles.
Propos recueillis par Fanny Marlier
Source :
http://www.lesinrocks.com/2016/12/07/actualite/parti-neo-nazi-aube-doree-populaire-grece-11885524/

happywheels

5 Commentaires

  1. gozou dit :

    hitler a pris le pouvoir a cause de la crise..quand un pays vas mal…les gents pense que les populiste nazi vont les aider…pauvre naif…

  2. Golmon dit :

    Comme dirait Rocco siffredi des aubes dorés ça se trouve partout et pas que grâce au staphylocoque ….

  3. Golmon dit :

    les aubes dorés engraissent…..des glands bien gras , en sorte !

  4. Jacques dit :

    En tout cas en France,peu de risque d un tel parti tant que les nazis se tapent entre eux:jetez un oeil à ça,perso j ai rigolé
    https://youtu.be/Lb0JkZmezAE

  5. aval31 dit :

    Les grecs ont raison de tout vouloir péter en particulier les engendreurs de tafioles européastes génocidaires des blancs européens dont les juifs progressistes* ont été les précurseurs et contre leur propre peuple.

    Les grecs ont raison par n’importe quel moyen de ne pas vouloir finir comme les juifs !

    Les leader juifs en ayant ch… sur Israël pendant 2000 ans (et refusé les création d’Israël dans les années 1830) ont construit la tombe de leurs enfants et de leur peuple.

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