Attentats de janvier 2015 : 30 ans de réclusion requis contre Hayat Boumeddiene en fuite et la perpétuité contre Ali Riza Polat

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L’accusation a demandé une période de sûreté des deux tiers contre la jeune femme, estimant qu’elle avait joué un «rôle important» dans la préparation des attentats.
Par Paule Gonzalès

Hayat Boumeddiene, à gauche, veuve du terroriste Amedy Coulibaly. FRENCH POLICE / AFP
Des peines lourdes requises au procès des attentats de janvier 2015 lundi, en fin de matinée, après près de trois mois d’audiences. Le parquet a requis la peine maximale pour l’absent Mohamed Belhoucine, intime d’Amedy Coulibaly, soit la réclusion criminelle à perpétuité avec une période de Sûreté de 22 ans, avec maintien du mandat d’arrêt.
Il en est de même d’Ali Riza Polat, accusé de complicité d’actes terroristes. Contre Mehdi Belhoucine, absent également, est requis 20 ans de réclusion avec une peine de sûreté de deux tiers.
Il est requis contre la veuve de Coulibaly, Hayat Boumedienne, qui se trouve toujours en Syrie, 30 ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté des deux tiers.
Dans le spectre haut de l’association de malfaiteurs terroriste criminelle, est requis contre Willy Prévost, accusé d’être le factotum d’Amedy Coulibaly, 18 ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté des deux tiers, tandis que contre Mickaël Pastor Alwatik, ami du terroriste de l’Hypercacher, il est requis 20 ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté.
Amar Ramdani, ancien de la «secte de la buanderie», ami proche de Coulibaly, voit requérir contre lui pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, et au titre de fourniture d’armes et de soutien financier, 17 ans de réclusion criminelle avec peine de sûreté des deux tiers. Abdelaziz Abbad, impliqué dans le volet démarchage d’armes pour les frères Kouachi et Coulibaly, voit également requérir contre lui 18 ans avec une période de sûreté des deux tiers, et 15 ans contre son binôme Miguel Martinez.
«Ils ont été la la cheville ouvrière, la base arrière de ce projet »
Après un jour et demi de réquisitions dans le prétoire des attentats de Charlie Hebdo et de l’Hypercacher, depuis le Tribunal de Paris, le duo de magistrats du parquet, Julie Holveck et Jean-Michel Bourlès, donnent la sensation d’avoir franchi l’Everest. Sur leurs épaules, ce procès délicat et douloureux où sont jugés ni les auteurs des crimes ni leurs commanditaires, mais comme l’a rappelé Julie Holveck, «cette chaîne de responsabilité sans laquelle les frères Kouachi et Amedy Coulibaly, ce trio mortifère, n’est rien». «Tous ont agi sous le sceau du terrorisme» a-t-elle insisté. «Ils ont été la cheville ouvrière, la base arrière de ce projet : du cercle des connaissances à l’homme de confiance, de la petite main à l’homme de main, de la petite frappe au voyou patenté, du lieutenant au commandant, du fou de Dieu à l’opportuniste cynique, de l’homme des basses besognes à l’homme des desseins violents».
«Nous ne sommes pas une justice d’exception, ni une cour spéciale, ni un tribunal révolutionnaire. Quand nous revêtons la robe du ministère public, notre rempart est l’Etat de droit. Il n’est pas question de faire payer aux vivants les faits des morts, mais de punir les vivants qui ont permis aux morts leur passage à l’acte», a martelé haut et fort la magistrate qui, fait inhabituel et émouvant, a aussi rappelé qu’elle était ces jours-là – le 7, le 8 et le 9 janvier 2015 – « de permanence au parquet de Paris et sur place comme le code de procédure pénale l’exige», témoignant à son tour en évoquant «ce kaléidoscope fou de l’horreur, l’amoncellement de corps dans cette rédaction si petite et si exiguë, le massage cardiaque désespéré sur le corps d’Ahmed Merabet, ces images rétiniennes, l’odeur de sang et de poudre».
Tout au long de ces réquisitions serrées, collées à l’ordonnance de mise en accusation, le parquet a navigué sur une seule ligne de crête, éviter que ne saute le T de l’AMT pour «Association de malfaiteur en vue d’une entreprise terroriste». Et pour cela il a rappelé une fois de plus la jurisprudence qui n’exige pas pour que cette infraction soit constituée par une participation directe ou une connaissance parfaite du projet, mais le fait que les protagonistes ne pouvaient ignorer « l’option terroriste ».
« Il existe des angles morts dans cette procédure »
Dans leurs réquisitions, les deux avocats généraux déroulent pour chacun des accusés la même grille d’argumentation : l’ancrage dans la radicalité islamique de chacun, même quand elle est niée comme pour Willy Prévost, leur connaissance de celle d’Amedy Coulibaly dont ils ne pouvaient ignorer sa volonté de passer à l’acte, leur intense proximité à l’instar de la « secte de la Buanderie » ou du fait « des liens de cœur » comme ceux qui existent entre Amar Ramdani et Saïd Makhlouf. Les magistrats reconstituent le lassis serré des échanges téléphoniques, – pièce maîtresse de la procédure – et de l’intensification de leurs déplacements et rendez-vous jusqu’au 6 janvier. Récit d’autant plus fastidieux que, comme l’a reconnu Julie Holveck, « il existe des angles morts dans cette procédure ».
Ces angles morts, ce sont ces deux filières de fournitures d’armes, l’une lilloise, et l’autre ardennaise, et la difficulté de tracer les transits et les livraisons aux trois terroristes. « Il n’existe pas de hasard », s’est exclamée Julie Holveck durant ces réquisitions pour expliquer le puzzle compliqué qui lie les 11 prévenus dans le box. Cette construction procédurale dont la précarité s’est nourrie du silence, des contradictions, et des justifications douteuses des onze prévenus s’est notamment fissurée, lorsque l’avocat général Jean-Michel Bourlès a reconnu « ‎la minceur du fil » au sujet de Mohamed Farès, l’un des vendeurs d’armes lillois. «Il existe toujours des doutes» a-t-il admis. Et de demander la requalification en association de malfaiteurs criminelle, sans la circonstance aggravante de terrorisme. Un séisme pour les parties civiles. Un temps infini est consacré à la filière ardennaise et ses deux « duo en miroir »: Abdelaziz Abbad et Miguel Martinez, ainsi que Metin Karasular et Michel Catino, garagistes de leur état, destinataires de listes de courses d’armes, en lien avec Saïd Kouachi et Amédy Coulibaly. Pour Julie Holveck, tous possédaient les clés pour comprendre que leurs commanditaires évoluaient dans un milieu radical.
Enfin une matinée entière a été consacrée à Ali Reza Polat, dénoncé par le parquet comme à la fois le cœur de chauffe de la nébuleuse gravitant autour d’Amedy Coulibaly et présent transversalement à toutes les étapes de la préparation. Les s avocats généraux ont rappelé à la cour que sa décision était attendue par l’ensemble des concitoyens et des acteurs internationaux.
Source :
https://www.lefigaro.fr/actualite-france/proces-des-attentats-de-janvier-2015-30-ans-de-reclusion-requis-contre-hayat-boumeddiene-20201208

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2 Commentaires

  1. capucine dit :

    30 ans de requis ? alors qu’elle est fuite ? ça sert à quoi …

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