L’ hebdomadaire LE POINT démolit Jean-Luc Mélenchon

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Le leader des Insoumis multiplie les déclarations complotistes, notamment envers le Crif. Égarement passager, atavisme ou pur cynisme ?

Par Clément Pétreault

Jean-Luc Mélenchon lors d’une manifestation contre la réforme des retraites, à Paris, le 6 juin 2023.© Quentin de Groeve/Hans Lucas via AFP
Publié le 19/07/2023 à 18h00
Un complotiste en mission kamikaze… C’est par ces mots que d’anciens amis de Jean-Luc Mélenchon décrivent l’état d’esprit qui guide actuellement le chef des Insoumis, dont les dérapages aussi réguliers qu’un métronome ne cessent de semer la gêne et la discorde dans son propre camp.
Dernier fait d’armes, un tweet rageur, en réponse à un discours du président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), qui, lors de son allocution prononcée à l’occasion de la commémoration du 81e anniversaire de la rafle du Vél’d’Hiv, a dénoncé « les porte-voix de La France insoumise [qui] font bien plus partie du problème que de la solution. En choisissant le clientélisme plutôt que l’universalisme, en s’égarant dans la complaisance avec l’islamisme, avec Poutine ou les partisans des appels aux émeutes, ils sèment une confusion idéologique, meilleur allié de l’extrême droite ».
Cette analyse – pourtant largement partagée par de nombreux politologues – a fait sortir de ses gonds Jean-Luc Mélenchon : « Le président du CRIF utilise la cérémonie à la mémoire des victimes de la rafle des juifs par la police française pour me prendre à partie. Abject. L’extrême droite n’a plus de limite » a écrit l’ancien député, ainsi convaincu que le Crif serait… « d’extrême droite ». « Cette accusation est grotesque et déplacée, explique au Point Yonathan Arfi, le président du Crif. Le Crif a été fondé en 1943 dans la Résistance et a toujours été engagé dans le combat frontal contre l’extrême droite. »
Les voix pour défendre Jean-Luc Mélenchon se font rares, même dans les rangs Insoumis… Seul Manuel Bompard, coordinateur de LFI, le soutient : « Nous n’avons pas de leçons à recevoir dans la lutte contre le racisme, contre l’antisémitisme. »
S’agit-il d’une énième sortie de piste d’un leader politique irascible ou d’une vraie stratégie ? « Stratégie totalement consciente et assumée », tranche-t-on dans l’entourage d’un ministre influent, où l’on fait remarquer que c’est la deuxième cérémonie de la rafle du Vél’d’Hiv émaillée de polémiques lancées par des députés Insoumis. « Au moins, l’année dernière, les députés Insoumis de Paris avaient fait le déplacement avant de tweeter… Cette année, ils avaient été à nouveau invités à la commémoration, mais aucun député LFI de Paris ne s’est présenté. »
Déjà, en 2022, la présidente du groupe LFI et députée du Val-de-Marne, Mathilde Panot, écrivait sur Twitter :« Il y a 80 ans, les collaborationnistes du régime de Vichy ont organisé la rafle du Vél’d’Hiv. Ne pas oublier ces crimes, aujourd’hui plus que jamais, avec un président de la République qui rend honneur à Pétain et 89 députés RN ! » Une grille d’interprétation désormais devenue classique dans la rhétorique Insoumise : « Macron = extrême droite. »
La thèse d’un égarement passager ne séduit pas ceux qui connaissent Mélenchon. « Un responsable politique qui explique que les abayas ne sont pas des vêtements religieux et que le Crif est d’extrême droite, ce n’est pas un tonton qui dérape dans un dîner trop arrosé, c’est une ligne politique claire », estime un ex-compagnon de route du leader Insoumis et observateur aguerri du jeu politique. Sa tactique est perdante et il le sait. Jamais on n’a vu la gauche à un niveau aussi bas. 27 %, c’est un échec. Mélenchon va conduire l’extrême droite au pouvoir, mais, pour ne pas dire que c’est sa responsabilité, il explique qu’elle est déjà là… et que, si la droite libérale l’a emporté, ce n’est pas de sa faute, c’est parce que quelque chose de très grave est à l’œuvre dans le pays. »
Cette théorie se vérifie dans une interview accordée à Mediapart, où Jean-Luc Mélenchon explique que ses adversaires essaient de le « diaboliser » pour le rendre « infréquentable » et prétend connaître les vraies raisons de ces attaques : « Notre ciblage n’est en fait qu’un prétexte à une autre visée politique, à savoir l’unification des droites. » On nage en plein complotisme, il suffit de constater les divisions profondes qui fracturent la droite depuis des années pour le constater.

Faut-il dès lors considérer ces dérapages antisémites comme la marque d’un phénomène de « corbynisation » d’une partie de la gauche en France, en référence à l’ancien leader travailliste anglais ? « Jeremy Corbyn a laissé passer l’antisémitisme dans son parti et n’a pas pris la mesure des dérives multiples ; c’est une forme d’antisémitisme. Il est vrai que Mélenchon se compare souvent à Corbyn, expliquait déjà au Point en octobre 2022 la sociologue israélienne de gauche Illana Weizman. Il répète que les attaques contre lui, comme celles visant Corbyn, n’ont qu’un but : saper son programme social et radical. Ce qui frappe chez Mélenchon, c’est également sa passivité. Quand il reprend à son compte le mythe du peuple “déicide”, c’est énorme. On est dans le mythe fondateur de l’antisémitisme. C’est vraiment la matrice. Mélenchon est dans le déclaratif. Il répète : “Moi, j’ai toujours lutté contre les racistes.” Cependant, quand on lui signale des propos antisémites, il laisse passer et ne se remet pas en question. »
Pour Iannis Roder, professeur d’histoire-géographie à Saint-Denis (93) et directeur de l’Observatoire de l’éducation de la Fondation Jean-Jaurès, les déclarations outrancières de Jean-Luc Mélenchon sont le fruit d’un calcul politique d’implantation et de consolidation électorale : « LFI espère s’assurer la fidélité d’un électorat musulman en flattant les bas instincts pour se constituer des fiefs électoraux qui lui assureront un minimum de députés à chaque élection. Je ne suis pas certain que ce soit une stratégie payante… » Le Parti communiste avait sa ceinture rouge avec l’électorat ouvrier, LFI aura peut-être sa ceinture « verte », son socle communautariste.
Reste que ses prises de position menacent la pérennité de la Nupes, qui voit s’accumuler les désaccords… toujours plus profonds depuis les émeutes. À tel point que les alliés ne sont plus d’accord sur rien. D’un côté, il y a Jean-Luc Mélenchon, qui voit dans le tumulte des émeutes les germes de l’insurrection révolutionnaire tant attendue, qui a refusé de condamner ces violences ou même d’exprimer un désir clair d’apaisement, laissant croire qu’il faudrait choisir entre calme et justice (comme si les deux étaient incompatibles).
De l’autre, il y a ses alliés communistes, écologistes et socialistes qui savent à quel point les images de chaos et les paroles ambiguës sont un poison pour la démocratie comme pour les quartiers populaires, qui eux aussi aspirent au calme… Pour ne pas sombrer avec le leader Insoumis, le socialiste Olivier Faure et le communiste Fabien Roussel ont entrepris de le lâcher. Le premier a ainsi évoqué son « profond désaccord » avec Mélenchon alors que le second s’en est totalement désolidarisé. Ce n’est pas un divorce, mais ça en prend le chemin.
Dans la Nupes, il y a désormais ceux qui prônent l’ordre et ceux qui espèrent le désordre, ceux qui défendent la modération quand d’autres sont dans l’exaltation, ceux qui aspirent à gouverner et ceux qui ne pensent qu’à la révolution… Sans oublier les contradictions propres à la psyché mélenchonienne : « Il dit qu’il est pour l’unité, mais il rend les conditions de l’unité de plus en plus difficiles. C’est une vieille technique lambertiste dont le seul but est d’écraser ses alliés. Dans un système politique où seule compte la candidature à la présidentielle, il sait qu’il n’est pas grave d’être seul, au contraire », analyse un ancien trotskiste. Éviter la défaite au prix de la compromission, c’est surtout prendre le risque de la défaite et de la compromission.

Mélenchon, dérapages en série
«  Vous verrez que, dans la dernière semaine de la campagne présidentielle, nous aurons un grave incident […], ou un meurtre. Ça a été Merah en 2012, ça a été l’attentat la dernière semaine sur les Champs-Élysées… […] Tout ça, c’est écrit d’avance.  »
(France Inter, 6 juin 2021)
«  [Éric Zemmour] reproduit beaucoup de scénarios culturels : on ne change rien à la tradition, on ne bouge pas, la créolisation mon Dieu quelle horreur  ! Et tout ça, ce sont des traditions qui sont beaucoup liées au judaïsme.  »
(BFM TV, 28 octobre 2021)
«  [Jeremy Corbyn] a dû subir sans secours la grossière accusation d’antisémitisme à travers le grand rabbin d’Angleterre et les divers réseaux d’influence du Likoud […]. Au lieu de riposter, il a passé son temps à s’excuser et à donner des gages. Dans les deux cas il a affiché une faiblesse qui a inquiété les secteurs populaires.  »
(Sur son blog, 13 décembre 2019)
«  Les médecins et une mission d’enquête sont allés en Russie et ont dit que le vaccin fonctionnait à 92  %. Les Russes voulaient bien fabriquer les vaccins avec nous. Mais nous avons répondu non,car ils sont russes.  »
(France 3, 7 mars 2021)
Source https://www.lepoint.fr/politique/les-vieux-demons-de-jean-luc-melenchon-19-07-2023-2528910_20.php

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3 Commentaires

  1. Paul06 dit :

    Un type ignoble, prêt à tout et surtout au pire, pour attirer une certaine clientèle, prêt à trahir les valeurs republicaines pour satisfaire son ego en gagnant des elections. Et il a su s’entourer d’autres sales types partageant le même objectif et les mêmes moyens. Qui voterait pour un nupiste si ce n’est un fasciste de gauche. Le vide de la vie politique française ouvre une voie royale à Le Pen ou Zemour. Ce sera l’œuvre de Melenchon, le souvenir qu’il laissera de sa vie politique. Il peut disparaître ainsi que tous ceux qui aboient en cœur avec lui.

  2. joseparis dit :

    Mélenchon se rêve comme l’émir des banlieues pour s’assurer les voix des prophétariens. Il sait que l’antisémitisme est virulent dans ces banlieues, donc il ne dérape pas sur les juifs, c’est une tactique voulue. Ses soutiens se taisent pour ne pas se mettre le leader « islamo » à dos, garder leurs investitures, et donc leurs sièges lors des prochaines élections. C’est du clientélisme dans tous les sens.

  3. benjamin dit :

    il est plus que temps que le che de bistrot! le melenchon prenne sa retraite …. au venezuela par exemple !!!!

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