L’ influenceur franco-iranien Shahin Hazamy lié à la République islamique d’Iran sera jugé pour « apologie du terrorisme »

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Cette personne qui distribue des drapeaux de la République Islamique d’Iran et s’exprime au micro s’appelle Shahin Hazamy, j’ai enquêté sur lui et sa proximité avec le régime iranien pour
. Il sera jugé le 3 juillet prochain pour apologie du terrorisme

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@NoraBussigny

L’influenceur franco-iranien, Shahin Hazamy, auquel nous avions consacré une enquête en novembre 2024, a été interpellé à son domicile le 22 avril par la police française. Il pourrait être lié, selon au moins deux sources, au Corps des Gardiens de la révolution islamique, le bras armé du régime iranien.
Shahin Hazamy, 29 ans, dont nous avions parlé dans une longue enquête publiée le 14 novembre 2024, a été interpellé par la police française à son domicile, le mardi 22 avril, au petit matin. Hazamy, apparemment habitué des allers-retours à Téhéran et Beyrouth, appartient à la sphère des influenceurs relayant les éléments de langage de la République islamique d’Iran et de ses proxys de « l’axe de la résistance » comme le Hamas, le Hezbollah et les Houthis.

Les exemples ne manquent pas. Le 23 février 2025, il publiait notamment une vidéo des funérailles d’Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah – la milice chiite libanaise pro-iranienne -, avec le commentaire suivant : « Aujourd’hui, j’ai assisté aux funérailles de Seyyed (titre honorifique qui qualifie un descendant du prophète Mahomet en islam, ndlr) pour couvrir l’hommage émouvant que lui ont rendu plus de 1,4 million de personnes à Beyrouth. »
Le 26 février, il postait une photo sur laquelle on le voit poser fièrement le long de la frontière entre le Liban et Israël, faisant le signe de la victoire. Véritable ligne de front, la zone en question est en grande partie sous le contrôle du Hezbollah. En légende, il écrivait : « Nous danserons sous le ciel libéré, nous pleurerons de joie, nous scanderons ensemble les chants de la victoire. Ce jour viendra, car aucune occupation n’est éternelle, et aucun mur ne peut résister à la force d’un peuple qui aspire à la liberté. »
Le 19 mars, il republiait sur son réseau une affiche sur laquelle on voit le portrait de Mahdieh Esfandari, une ressortissante iranienne de 39 ans, traductrice de profession, mise en examen et incarcérée depuis le 28 février 2025 – en détention provisoire – à la prison de Fresnes pour « apologie du terrorisme ». L’affiche en question, initialement diffusée par La ligue de la jeunesse révolutionnaire et des jeunes révolutionnaires, portait la légende : « En prison pour avoir défendu le peuple palestinien ».

Selon un article publié le 24 avril dans le Point par la journaliste d’investigation Nora Bussigny, qui cite une source proche du dossier, « Le compagnon de la jeune femme, un ambulancier de nationalité française, est soupçonné d’avoir publié sur un compte Telegram des messages d’une violence particulière, appelant notamment à lancer l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » (nom donné par le Hamas aux massacres du 7 Octobre, Ndlr) en France, et incitant à « sortir avec des fusils » et, pour ceux qui n’en avaient pas, « des couteaux et des hachoirs ».

Hazamy, qui se présente comme journaliste, n’est pas à une provocation près. Quelques semaines après la publication de notre enquête du mois de novembre, il diffusait des photographies de missiles balistiques exposés sur un site officiel de la République islamique d’Iran. L’une de nos sources, qui a travaillé à haut niveau au sein du régime iranien, les commentait en nous expliquant que pour avoir accès à ce genre d’endroit, « il faut être un invité spécial, ou alors être membre du Bassij (la milice civile des Gardiens de la révolution islamique en charge de la sécurité intérieure, qui est aussi l’une des portes d’entrée de la Force al Qods pour les jeunes recrues, ndlr) ». Cette source ajoutait, en parlant des photos diffusées par Hazamy : « S’ il les a prises, je dirais que c’est sans doute un membre du Bassij ».

Shahin Hazamy nie évidemment toute implication aux côtés de la République islamique d’Iran. Cependant, ses voyages en Iran, alors même qu’il est recommandé par le ministère des affaires étrangères français de ne pas s’y rendre, et que deux otages français y sont encore détenus dans des conditions inhumaines, interrogent.
D’autant qu’il a été reçu, le 4 décembre 2023, au ministère des affaires étrangères iranien, aux côtés de l’activiste suprémaciste béninois Kémi Séba – connu pour ses positions pro-iraniennes – qui a été déchu de la nationalité française en 2024.
Or, comme nous l’expliquions au mois de novembre, ledit ministère serait à l’origine d’une vaste opération d’influence lancée aux Etats-Unis et en Europe depuis 2014, en partenariat avec les services secrets iraniens du ministère de la sécurité, et la force al Qods du Corps des gardiens de la révolution.
Autre élément qui interroge. Hazamy déplorait au printemps dernier que Bashir Biazar, « un jeune ressortissant iranien, a été interpellé par la police française près de Metz. » Il lui aurait été reproché, selon l’influenceur issu des quartiers d’« avoir diffusé sur ses réseaux sociaux des stories et des publications propalestiniennes. » Problème : Bashir Biazar, qui résidait à Dijon, était suivi par la police française, car soupçonné d’appartenir à l’unité secrète dite « 840 » de la Force al Qods, qui a notamment pour mission de planifier des enlèvements et des attentats contre des cibles occidentales et israéliennes, de faire du renseignement et de recruter des agents étrangers. Biazar faisait aussi l’objet d’une plainte déposée par des militants franco-iraniens des Droits humains, l’accusant de « complicité (…) d’actes de torture psychologique, physique, traitements cruels, inhumains et dégradants. » Biazar, enfin, était apparemment considéré comme un agent de haut niveau par les officiels de la République islamique d’Iran, qui l’ont reçu avec les honneurs lors de son retour à Téhéran.

Comme nous l’expliquait il y a quelques temps Adrian Calamel, un chercheur américain spécialiste du Corps des gardiens de la révolution islamique et de l’ingérence iranienne, qui collabore avec l’Arabian Peninsula Institute, une nébuleuse d’agents d’influence liés à la République islamique d’Iran œuvreraient aux Etats-Unis et en Europe : « En ce qui concerne la France, les disciples de l’Ayatollah Khomeini l’ont toujours considérée comme un terrain de recrutement fertile (…) ».
Plusieurs médias de la République islamique d’Iran ont dénoncé l’arrestation de Shahin Hazamy, qui est ressorti libre, et sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) « pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public ». La justice vise notamment des propos qu’il aurait tenus sur l’attaque terroriste perpétrée par le Hamas le 7 octobre 2023. Selon l’agence France Presse (AFP), ses avocats ont indiqué qu’ « en s’en prenant à un journaliste, la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse », ajoutant que celui-ci avait « subi un traitement inadmissible ».
« Ce sont des personnes très proches, et de confiance, de la force al Qods », selon l’ex-policier Matthieu Ghadiri
Les arrestations, en quelques mois seulement, de Bashir Biazar, Mahdieh Esfandari et Shahin Hazamy, démontrent que les services français ne laissent rien passer dès lors qu’il s’agit de soupçons d’ingérence iranienne. Depuis la loi du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en France, celles-ci sont en effet sanctionnées pénalement. Il faut aussi noter que ces affaires, qui ciblent deux iraniens et un franco-iranien, interviennent dans un contexte de tensions importantes entre Paris et Téhéran, alors que deux ressortissants Français, Cécile Kohler et Jacques Paris, sont détenus de façon arbitraire en Iran depuis le mois de mai 2022 « dans des conditions qui, en droit international, sont assimilables à de la torture », selon les propos du ministre français des affaires étrangères mi-avril.

« Ces arrestations sont importantes. Elles montrent que les services de renseignements français sont capables d’identifier des personnes en France qui sont en relation très étroites avec la Force Al Qods et de les traduire en justice », explique l’ancien policier et officier de liaison de la police nationale en Turquie et en Bulgarie, Matthieu Ghadiri. Franco-iranien, il a opéré en tant qu’agent infiltré en Iran, et connaît parfaitement les rouages des différents services du renseignement iranien. « En général, quand on défend ouvertement un régime comme ils le font avec celui de Téhéran, ou qu’on s’en prend à des opposants iraniens à l’étranger, c’est qu’on est un agent d’influence. Surtout quand on est reçu en grande pompe en Iran, ou par les groupes terroristes créés et soutenus par la République Islamique dans la région. Ces agents d’influence essayent de cacher leurs liens avec les gardiens de la révolution islamique, mais ils utilisent les mêmes éléments de langage que la Force Al Qods, en soutenant et justifiant les actions des groupes terroristes comme le Hamas, et les massacres des innocents perpétrés le 7 octobre par ces terroristes soutenus par les Gardiens de la Révolution islamique. En général, on devient agent d’influence de la République islamique quand on répète et soutient haut et fort le terrorisme du Hamas, et des autres groupes terroristes islamistes dans la région, comme la Force al Qods », assure-t-il.
Reste à savoir si la Justice française établira des éléments qui confirment ou pas l’analyse de l’ancien fonctionnaire de police, qui conclut à propos de ces 3 affaires : « C’est un pas important dans la lutte contre l’entrisme de la République islamique d’Iran en France. Ça prouve aussi que la force al Qods est en position de faiblesse (…). En effet, si ces affaires étaient survenues il y a six mois, les mollahs auraient été plus agressifs. Là, ils réagissent mollement, compte tenu de la situation actuelle en Iran et dans la région. »
Source
Atlantico

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