Attentat de Manchester : «Le gouvernement britannique a envoyé des signaux qui ont encouragé la violence antisémite»

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Par Elea Cauvin
Un attentat devant une synagogue de Manchester ce jeudi, a fait deux morts et trois blessés. Pour Jeremy Stubbs, président de l’Association des conservateurs britanniques de Paris, l’indulgence du gouvernement vis-à-vis des violences commises par des musulmans a contribué à débrider l’antisémitisme au Royaume-Uni.
Jeremy Stubbs est président de l’Association des conservateurs britanniques de Paris et directeur-adjoint de la rédaction de la revue Causeur.

LE FIGARO. – Un attentat meurtrier est survenu dans une synagogue près de Manchester, le jour symbolique de la fête juive de Yom Kippour. Que révèle-t-il sur des menaces pesant sur la communauté juive au Royaume-Uni ?
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JEREMY STUBBS. – L’attentat a déjà été déclaré de nature terroriste par les autorités, qui ont dans un premier temps hésité à révéler l’identité de l’agresseur. Il s’agit d’un attentat islamiste, même si dans les médias et les commentateurs ont d’abord évoqué la possibilité de l’extrême droite. C’était une piste peu probable, d’autant que l’attentat coïncide avec un moment où le projet de paix de Donald Trump est en considération et que tout ce qui peut envenimer les relations peut le mettre en péril. La gravité de l’attentat et le moment choisi, la fête juive la plus importante, semblent suggérer un attentat islamiste, délibéré, avec une portée politique.
Cette progression traduit une hostilité que témoigne une minorité importante de musulmans à l’égard de la minorité juive au Royaume-Uni. On peut ajouter à cela le poids des militants islamo-gauchistes, qui ont pour habitude d’avoir un langage violent. Ce langage violent est nécessairement le précurseur d’actes violents. Il y a eu récemment à Londres une manifestation avec des slogans hostiles aux juifs. On se rappelle aussi des paroles prononcées par le rappeur Bob Vylan, au festival de Glastonbury puis lors d’un concert à Amsterdam. Ce sont des mots qui incitent à la violence. Sans dire que les agresseurs d’aujourd’hui soient inspirés directement par ces paroles, cela contribue à créer une atmosphère où le passage à l’acte devient plus probable.
Il existe également une certaine indulgence de la part des autorités vis-à-vis d’agressions ou de violences commises par des musulmans au Royaume-Uni. On a par exemple vu le cas de l’homme qui a profané un Coran devant le consulat turc en février, passé à tabac par un homme sorti du consulat et par un passant à vélo. Celui qui est sorti du consulat a écopé d’une peine relativement légère, tandis que l’auteur de la profanation a été condamné à une amende. Le jugement a ressemblé à une condamnation pour crime de blasphème. Plus récemment, le chanteur du groupe Kneecap, un groupe irlandais populaire qui n’hésite pas à lancer des slogans anti-israéliens, pro-palestiniens, pro-Hamas, pro-Hezbollah, avait été accusé pour ses propos. Il a été débouté depuis le plus haut niveau institutionnel, puisque c’est le ministre en charge des institutions judiciaires qui avait omis de donner sa permission à temps pour cette poursuite.
Ces signaux semblent encourager les musulmans tentés par la violence, leur suggérant qu’ils ne seront ni sévèrement jugés ni lourdement punis. Cela ne constitue pas la cause directe de l’attentat, mais contribue à créer une atmosphère où certains se sentent autorisés à aller plus loin dans la violence anti-israélienne et antisémite.
On peut considérer que la décision de Keir Starmer, comme celles d’Emmanuel Macron, de Marc Carney au Canada et d’Anthony Albanese en Australie, est mal fondée et malvenue. Dire qu’elle est la cause directe de cette violence est une autre affaire, mais elle contribue indirectement à un climat où les juifs apparaissent comme toujours fautifs. Après chaque attentat, les dirigeants politiques déclarent faire tout leur possible pour protéger la communauté juive. Or, cette fois, cela n’a pas été le cas. Un attentat antisémite a récemment été déjoué par les autorités allemandes. Les autorités britanniques, elles, ont échoué et devront en tirer les conséquences.
Concernant la reconnaissance de l’État palestinien, il semble que Keir Starmer ait subi la pression des militants et élus pro-palestiniens de son parti, ainsi que d’une partie de l’électorat. Il est aussi probable qu’il ait été influencé par certains de ses homologues internationaux, comme Emmanuel Macron et Marc Carney. Toutefois, Starmer a imposé des conditions à Israël et non pas aux Palestiniens ni au Hamas, ce qui apparaît particulièrement problématique.

Manchester est un centre important de la communauté juive, en raison de l’installation de nombreux juifs venus de Russie à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. L’attentat, commis le jour d’une fête majeure, prend une valeur symbolique extrême et d’une agressivité sans limite. Il s’agit d’un pas particulièrement grave. En France, il y a eu des attentats antisémites graves, mais pas de cette intensité récente. Le Royaume-Uni avait déjà connu, après le 7 octobre, de grandes manifestations qualifiées de « marches de la haine », sans équivalent en France, où elles avaient été interdites.
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Un autre problème réside dans ce que l’on appelle au Royaume-Uni le « two-tier policing », un maintien de l’ordre à deux vitesses. La police et la justice se montrent indulgentes face aux protestations pro-palestiniennes ou islamistes, tandis qu’elles répriment plus sévèrement les manifestations pro-israéliennes ou considérées comme de droite. On a vu des forces de l’ordre expulser d’une manifestation un participant lançant des slogans pro-Israël, tandis que les slogans opposés étaient tolérés. Là encore, les autorités portent une part de responsabilité. Chaque fois qu’il est question d’islam, les autorités britanniques font preuve d’une grande prudence, parfois d’une peur manifeste, qui finit par encourager ce qu’elles prétendent condamner. Même le gouvernement conservateur avait cette attitude. Sous un gouvernement travailliste dont une partie de l’électorat est musulmane, cette timidité est encore plus marquée.

Cette situation ne peut qu’encourager un repli identitaire au sein de la communauté juive en Europe. Ce sont des communautés qui se sentent assiégées et menacées, ce qui rend urgent un changement d’attitude de la part des autorités. Les simples déclarations de soutien ne suffisent plus : il faut des actions concrètes.

La première mesure serait de révéler rapidement l’identité de ceux qui ont commis, soutenu, financé ou préparé l’attentat. Il faut aussi sanctionner sévèrement toute manifestation de soutien à l’attentat, comme le fait déjà la France. Par exemple, après l’assassinat de trois petites filles à Strasbourg l’année dernière, les propos haineux postés sur les réseaux sociaux avaient été sévèrement réprimés. Le même traitement devrait être appliqué aux soutiens à l’attentat de Manchester. Ensuite, il faudrait cesser de prétendre que l’extrême droite représente une menace équivalente à l’islamisme. Les faits montrent quotidiennement le contraire. Minimiser la menace islamiste ne fait que rassurer abusivement une partie de la communauté musulmane et empêche une réponse ferme. Enfin, le Royaume-Uni doit reprendre sérieusement le dossier de l’extrémisme islamiste non violent, équivalent de ce que la France appelle le frérisme. Il s’agit d’une stratégie d’infiltration des institutions et d’influence idéologique, sans recours direct à la violence. Un rapport avait été commandé sur ce sujet il y a plus de dix ans, mais il a été enterré. Il faut le ressortir et traiter ce problème avec autant de sérieux qu’en France, où des intellectuels et responsables politiques comme Florence Bergeaud-Blackler ou Bruno Retailleau en parlent ouvertement.

SOURCE LE FIGARO

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