Un an et demi après, une plongée dans l’ambiance du lycée lillois Averroès

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C’est à Nanterre que s’est tenu mardi dernier le procès en diffamation que le lycée Averroès intente à Soufiane Zitouni, son ex-professeur de philosophie, pour deux tribunes parues dans « Libération ». Retour sur une polémique allumée au temps des attentats de Charlie Hebdo et pas tout à fait éteinte.
Il faut se souvenir du chaos de nos émotions, bien sûr. De l’effroi, de la douleur de ce début d’année 2015, après les attaques des frères Kouachi et d’Amédy Coulibali. Soufiane Zitouni était à l’époque l’un des nouveaux professeurs du lycée Averroès, dans le quartier de Lille-Sud.
« Beaucoup de choses me surprenaient, dit-il. Alors, j’ai voulu alerter, dans le contexte que nous vivions. » Mardi dernier, quand la présidente du tribunal lui demande s’il confirme aujourd’hui ses propos de l’époque, il n’hésite pas : « Oui, bien sûr. »

Des propos qui s’étalaient en janvier 2015 dans deux tribunes parues dans Libération, à quelques jours d’intervalle. « Ce qui me choquait, c’était le double discours des dirigeants du lycée, qui s’affichaient très libéraux, respectueux de la laïcité, pendant que des professeurs faisaient leurs ablutions dans les toilettes de la salle des profs, les pieds dans le lavabo, que d’autres faisaient leurs prières à l’endroit où on buvait le café… »
Pire, il parle des propos antisémites de certains élèves, des remarques de ses collègues musulmans masculins à propos des vêtements des professeures non musulmanes, et rappelle qu’à l’époque, sa première tribune avait été affichée dans la salle des profs, un tampon de l’établissement apposé par-dessus. « Je me pensais soutenu, alors… »
« J’évoque évidemment Israël et la Palestine, la guerre d’Algérie, l’islam, et personne n’est jamais venu me demander ce que j’enseigne dans mes classes. »
C’est pourtant pour une plainte en diffamation qu’on était devant le tribunal de Nanterre. Une plainte déposée par l’association Averroès, responsable juridique de l’établissement scolaire, présidée par Amar Lasfar,

également recteur de la mosquée de Lille-sud et actuellement président de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF). « Je me suis senti offensé, dit-il. Parler d’antisémitisme culturel, c’est jeter un discrédit injuste sur nos 862 élèves. »
Aujourd’hui, Soufiane Zitouni enseigne la philosophie dans un autre établissement, à Valenciennes. « Et tout va bien », dit-il à la présidente qui lui demande des nouvelles. Au lycée Averroès aussi, si on en croit le directeur d’aujourd’hui, et aussi un professeur d’histoire-géographie venu donner son témoignage. Ce jeune homme au regard franc souligne qu’il enseigne une matière assez sensible, en matière d’opinion, et il insiste : « J’évoque évidemment Israël et la Palestine, la guerre d’Algérie, l’islam, et personne n’est jamais venu me demander ce que j’enseigne dans mes classes. »
Il ne reconnaît pas le portrait qui est fait de son établissement. Amar Lasfar reconnaît quelques problèmes « mais pas pires qu’ailleurs ». Et s’appuie sur un rapport de l’Éducation nationale resté confidentiel. On sait juste que les inspecteurs jugeaient alors que le contrat avec l’État était « globalement respecté » mais qu’il convenait de clarifier la distinction entre l’établissement scolaire et l’association, ainsi qu’une « une certaine confusion entre l’enseignement d’éthique musulmane et la philosophie ».

Le lycée lillois Averroès ne poursuit pas que Soufiane Zitouni, ici. À côté du prof de philo est également assis Mohamed Louizi, qui a pris sa défense sur ses blogs. On est ici entre gens de connaissance : Louizi a publié un livre remarqué intitulé Pourquoi j’ai quitté les Frères musulmans, et au-delà de son soutien à Soufiane Zitouni, il donne une dimension politique à cette histoire. « Je connais la stratégie des Frères musulmans, je l’ai vécue pendant plus de dix ans. »
Il est entré à 13 ans dans ce mouvement. Il était au Maroc, alors, c’était son père qui l’y poussait : « À 13 ans, on ne choisit pas… » Lui parle de mélange des genres, souligne qu’il n’a « jamais attaqué les professeurs, les élèves, les parents, mais les dirigeants » de l’établissement, qu’il désigne comme « une direction de l’ombre », ou « une caste d’intouchables ». La charge est rude, l’audience est parfois tendue.
Mais Amar Lasfar se défend – c’est pourtant lui le plaignant –, mettant en évidence son travail, ses autres entreprises, les « 500 ex-élèves aujourd’hui cadres et les 862 qui vont le devenir ». Il vante son esprit d’entreprise et veut couper l’herbe sous le pied de son ex-protégé : « Il y a des salafistes respectueux de la République et qui ont un discours responsable. » Le fossé entre les deux idées se creuse un peu plus quand le président de l’UOIF lâche : « Quelque part, nous sommes tous des salafistes, dans le sens de se référer à nos ancêtres pieux. » Le procureur de la République a préféré en revenir aux textes incriminés. Pour lui, Soufiane Zitouni doit être relaxé, tandis qu’il retient la diffamation pour deux passages des blogs de Mohamed Louzi. Globalement, « c’est de la polémique, pas de la diffamation, sans cela, il n’y a plus moyen de s’exprimer… »
Source : http://www.lavoixdunord.fr/57000/article/2016-10-10/un-et-demi-apres-une-plongee-dans-l-ambiance-du-lycee-lillois-averroes

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5 Commentaires

  1. Lys26 dit :

    « Il y a des salafistes respectueux de la République et qui ont un discours responsable. » Je rêve! Nan je cauchemarde. De qui se moque t on?

  2. franccomtois dit :

    On attends toujours des Prix nobel de la secte á momo.Ce qu´ils veulent avant tout c´est nous occupé et nous faire comprendre que l´Islam est incontournable,sinon gare aux récalcitrant.Dés qu´un musulman ou qu´une musulmane(pire que tout)essaie de sortir du lot pour apporter du bien-etre á travers la culture,la science,que leurs arrivent-ils et bien ils sont menacés de mort.Comment voulez-vous qu´avec une telle secte de fadas nous ne finissions pas par épouser le néant.

  3. Golmon dit :

     » Il y a des salafistes respectueux de la République et qui ont un discours responsable. » Je rêve! Nan je cauchemarde. »
    LOL !
    c’est le syndrome de Stockholm des occupés…

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